Loi Macron : Trois mesures patrimoniales qui encouragent l’investissement dans les entreprises

Eric DELFLY
Eric DELFLY - Avocat associé

  

Source : LOI n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques ( ci- après « Loi MACRON »)

I-   IMPATRIES : SECURISATION DES AVANTAGES FISCAUX EN CAS DE CHANGEMENT D’EMPLOI A L’INTERIEUR D’UN MEME GROUPE DE SOCIETES

Art 263 loi MACRON

Texte modifié : Art 155 B CGI

Date d’effets :à compter de la publication de la loi : 07 Août 2015 .

I-1 Le régime fiscal de l’impatriation (article 155 B du CGI)

I-11 Le régime.

Le régime est ouvert aux personnes qui s’installent en France en remplissant les conditions suivantes :

l’impatrié doit être un salarié ou un dirigeant fiscalement assimilé à un salarié. [1]

il est appelé pour occuper un emploi dans une entreprise établie en France :

qu’il s’agisse d’une société liée à celle pour laquelle il exerce son activité;

ou qu’il ait été directement recruté par une autre entreprise établie en France;

l’impatrié doit avoir été résident fiscalement hors de France durant au moins cinq années précédant sa prise de fonction

il devient résident de France à compter de l’année de commencement de son activité en France. Les contraintes notamment familiales justifient un délai de quelques mois entre la prise de fonction de la personne impatriée et l’installation en France de son foyer.

I-12 Les avantages

L’impatrié bénéficie d’une exonération:

dans certaines limites, du supplément de rémunération directement lié à l’exercice d’une activité professionnelle en France, « prime d’impatriation»

de la part de la rémunération se rapportant à l’activité que l’impatrié peut être amené à exercer hors de France;

d’impôt à hauteur de 50 % du montant des revenus de capitaux mobiliers, des gains réalisés à l’occasion de cessions de valeurs mobilières et de droit sociaux ainsi que revenus résultant de propriété littéraire et artistique ou au titre de concession de droit de propriété industrielle;

L’assujettissement à l’ISF est quant à, lui limité aux seuls biens situés en France.

Enfin, Le bénéfice de ces diverses exonérations s’arrête au 31 décembre de la cinquième année qui suite l’installation en France de l’impatrié.

I-2 l’apport de la loi MACRON

A L’avant le dernier alinéa du 1 du I de l’article 155 B du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le bénéfice du régime d’exonération est conservé en cas de changement de fonctions, pendant la durée définie au sixième alinéa du présent 1, au sein de l’entreprise établie en France mentionnée au premier alinéa ou au sein d’une autre entreprise établie en France appartenant au même groupe. Pour l’application de ces dispositions, le groupe s’entend de l’ensemble formé par une entreprise établie en France ou hors de France et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-3 du code de commerce ».

Le nouveau texte est une réponse apportée à l’administration fiscale qui considérerait que :

la condition tenant à la simultanéité entre la prise de fonctions en France et le transfert de la résidence fiscale de l’impatrié vers la France empêchait cet impatrié de continuer à bénéficier du régime favorable en cas changement de sa situation professionnelle. Celui ci, n’étais en effet plus non-résident au moment de la conclusion de son nouveau contrat de travail,

le même raisonnement s’appliquait en présence d’un mouvement intra-groupe puisque l’employeur n’étais pas identique (bien que membre d’un même groupe de société ) et qu’i en étais de même pour le contrat de travail français venant en substitution du contrat de travail étranger

L’article 155 B modifié règle cette difficulté en maintenant le bénéfice du régime fiscal des impatriés même si celui si change de fonction au sein d’un groupe d’entreprises établi en France.

II- ACTIONNARIAT SALARIE (BSPCE ET AGA) : UN ALLEGEMENT TRES SIGNIFICATIF

AGA : Attributions d’Actions Gratuites,

BSPCE : Bons de Souscription de Parts de Créateurs d’Entreprise,

II-1 Régime des AGA

Article 135 loi MACRON

Articles L225-197-1 et suivants du code de commerce,

Articles 80 quaterdecies et 200 A du CGI ,

Articles L. 136-2 , L. 136-6, L 137-13, L 137-14 et L 137-15 du code de la sécurité sociale ,

Article L 3324-10 du code du travail ,

Les AGA sont nés d’un amendement à la loi de finances pour 2005 [2] Le dispositif étais intéressant jusqu’à la loi de finance de la sécurité sociale 2007 qui l’a « tué dans l’œuf » à raison d’un coût social et fiscal [3] qui faisait perdre tout intérêt à l’opération.

Ce dispositif permet à une société par actions d’attribuer des actions gratuites provenant, soit d’actions auto détenues par la société et provenant d’un rachat préalable, soit d’actions émises dans le cadre d’une augmentation de capital, au profit des membres du personnel salarié de la société ou de certaines catégories d’entre eux.

Le nombre d’actions ainsi gratuitement distribuées ne peut excéder les seuils suivants :

10 % du capital social de la société à la date de la décision de leur attribution par le conseil d’administration ou le directoire,

15 % dans les sociétés dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation et ne dépassant pas, à la clôture d’un exercice social, les seuils définissant les petites et moyennes entreprises européennes; [4]

30 % [5] lorsque l’attribution d’actions gratuites bénéficie à l’ensemble des membres du personnel salarié de la société. L’écart entre le nombre d’actions distribuées à chaque salarié ne pouvant toutefois être supérieur à un rapport de un à cinq.

L’AGA est le dispositif dédié aux « start up » qui peuvent ainsi compenser la faiblesse des rémunérations par une participation gratuite au capital. Le salarié ainsi récompensé peut participer à la distribution des dividendes et donc aux fruits de la croissance à laquelle il contribue .Il profite également d’une fiscalité privilégiée sur les plus values dégagées lors de la cession de ces valeurs mobilières , pour autant qu’il ai respecté une période de conservation.

Le régime fiscal et social « de faveur » actuellement applicable aux AGA est cependant subordonné au respect d’un double délai, qui se décompose en :

-Une période dite d’acquisition à l’issue de laquelle l’attribution des actions aux bénéficiaires est définitive et dont la durée ne peut actuellement être inférieure à deux ans,

-Une période dite de conservation des actions par les bénéficiaires laquelle ne peut actuellement être inférieure à deux ans [6] ;

Toute cession avant l’expiration d’un délai minimum de quatre ans fait perdre aux bénéficiaires le bénéfice du régime de faveur au plan fiscal et social.

La loi MACRON introduit :

-les améliorations suivantes :

Le taux de la contribution patronale est ramené de 30 à 20%,

La contribution salariale spécifique de 10% sur les gains d’acquisition mais les prélèvements sociaux seront portés de 8 % à 15,5 % (dont 5,1 % déductibles).

Elle est exigible à la date d’acquisition définitive des titres par le salarié et non lors de la décision d’attribution des actions (cette attribution n’était d’ailleurs pas restituable dans le cas où les AGA n’étaient pas définitivement attribuées),

les bénéficiaires « profiterons » du régime des plus-values mobilières et ne seront pas imposés comme des salaires sur les gains réalisés. Cela implique donc la possibilité de bénéficier de l’abattement pour durée de détention applicable aux plus-values de cession d’actions compris sur la plus-value d’acquisition (égale à la valeur des actions au jour où elles sont définitivement acquises, soit au minimum à compter de l’attribution).

Et donc in fine pour mémoire :

 

 

 

 

 

Fiscalité   globale  

 

 

 

 

 

 

 

Avant la loi Macron Apres la loi
Pour le salarié

IRPP : 45 %

CESHR : 4%

Contribution   salariale :10 %

CSG : 8 %

Total 64 %

Durée de détention  [7]:

 

– 2 et 8ans :42,8 %

– après 8ans :35,25 %

Pour l’entreprise
Charges sociales sur 30 % de la   valeur des AGA distribuéesCharges sociales sur 20 % de la   valeur des AGA réellement acquises

 

II-2 Régime des BSPCE

Art 141 (art 35 PL) loi MACRON

Art 154 quinquies ,163 bis G , et 82 A ter du CGI

Art L. 228-91 et L. 228-92 du code de commerce,

A la différence des AGA : les BSPCE sont réservés :

aux seules sociétés par actions répondant à des caractéristiques strictes définies par l’article 163 bis G, II-al1 [8]du code général des impôts ,

aux bénéficiaires qui versent des fonds dans des actions dans des conditions prédéfinies.

La loi Macron modifie l’article 163 bis G et facilite l’attribution des BSPCE. ouvert aux sociétés non cotées ou cotées (dont la capitalisation boursière est inférieure à 150 millions d’euros) et ayant moins de quinze années d’existence en autorisant les attributions aux collaborateurs des filiales détenues à hauteur de 75 % par leur société mère.

Les entreprises issues d’une fusion pourront également continuer de bénéficier de ce dispositif très stratégique dans l’univers des start-ups pour attirer des talents.

Ce sont ici, davantage, les conditions d’application du régime des BSPCE que son traitement fiscal et/ou social qui sont visés par le projet de le texte .

III-. ASSURANCE-VIE : L’INVESTISSEMENT EN CAPITAL RISQUE ENCOURAGE

Art 137 Loi MACRON

Texte modifié : Art L 131 du code des assurances

A l’occasion d’un rachat ou du dénouement d’un contrat d’assurance-vie, le souscripteur ou le bénéficiaire du contrat pourront opter pour la remise de titres ou de parts, cotés ou non. A la condition toutefois que ces titres/parts ne confèrent pas de droits de vote à leur souscripteur et que ce dernier (ou son entourage familial proche) n’ait pas détenu, au cours des cinq années précédant le paiement, des titres ou des parts de la même entité que ceux remis par l’assureur.

Cela permettra aux contrats souscrits auprès de compagnies d’assurance françaises d’être plus souples et donc mieux à même d’affronter la concurrence, notamment luxembourgeoise. Outre l’apport concurrentiel, cet élément de souplesse était devenu nécessaire avec l’adoption des contrats vie-génération qui peuvent être investis de manière importante en placements non cotés, notamment des fonds ou FCPR/FCPI.

C’est en effet une manière d’éviter les problèmes liés à la non liquidité de certains actifs lors du dénouement partiel ou total du contrat.

Eric DELFLY

Vivaldi-Avocats

 


[1]Exemples : président du conseil d’administration, directeurs généraux de sociétés anonymes, président de SAS ou gérants minoritaires de Sarl ; [retour au texte]

[2] Loi n°2004-1484 de finances pour 2005. article 83 [retour au texte]

[3]Loi n° 2007-1786 de financement de la sécurité sociale pour 2008. art 13.[retour au texte]

[4] Pour mémoire : effectif inférieur à la clôture d’un exercice social à 250 salariés et total de bilan n’excédant pas 43 millions € ou montant HT de chiffre d’affaires n’excédant pas 50 millions €.[retour au texte]

[5]Loi n° 2014-384 du 29 mars 2014 visant à reconquérir l’économie réelle, [retour au texte]

[6] Cependant, si l’assemblée générale extraordinaire a retenu pour la période d’acquisition une durée au moins égale à quatre ans pour tout ou partie des actions attribuées, elle peut réduire ou supprimer la durée de l’obligation de conservation. [retour au texte]

[7]L’abattement peut être supérieur si les titres sont donnés par une PME ayant moins de 10 ans d’existence. [retour au texte]

[8] «Les sociétés par actions peuvent attribuer des bons de souscription de parts de créateur d’entreprise, incessibles et émis dans les conditions prévues aux articles L. 228-91 et L. 228-92 du code de commerce, aux membres de leur personnel salarié et à leurs dirigeants soumis au régime fiscal des salariés. » [retour au texte]

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