Une décision marocaine peut avoir autorité de la chose jugée en France

Geneviève FERRETTI
Geneviève FERRETTI

  

SOURCE : Cass , 1re civ., 30 avril 2014. n°12-23.712. Arrêt n° 445 P+B

 

La Cour de Cassation rappelle que la saisine d’une juridiction marocaine emporte renonciation à se prévaloir des règles de droit international privé en vigueur en France pour contester la compétence de cette juridiction.

 

En l’espèce, Mme X et son fils, alors mineur, demeurant en France, ont été blessés lors d’un accident de la circulation survenu au Maroc.

 

La mère a assigné, tant en son nom personnel qu’en sa qualité de représentant légal de son fils, en référé-expertise, puis au fond, devant une juridiction française, la compagnie d’assurance du seul véhicule impliqué dans l’accident, ainsi que la CPAM de Corse du Sud.

 

Parallèlement, Mme X a saisi aux mêmes fins une juridiction marocaine, laquelle a rejeté sa demande.

 

Se prévalant de la décision rendue par la juridiction étrangère, la compagnie d’assurance s’est opposée à la demande formulée par Mme X devant la juridiction française.

 

Les premiers juges puis la Cour d’Appel ont rejeté la demande de la mère, laquelle se pourvoit en Cassation.

 

Mme X fait grief à la Cour d’Appel d’avoir rejeté sa demande en indemnisation de son préjudice et celui de son fils, formée contre l’assureur, au motif qu’il incombe au juge français saisi d’un moyen tiré de l’autorité de la chose jugée d’une décision de justice rendue par une juridiction marocaine, sur le fondement de la convention franco-marocaine du 5 octobre 1957 d’aide mutuelle judiciaire, d’exequatur des jugements et d’extradition entre la France et le Maroc, d’examiner si les conditions énumérées à cet effet par l’article 16 (a et c) de ladite convention sont satisfaites.

 

Plus particulièrement :

 

Si la décision est d’après la loi du pays où elle a été rendue (en l’espèce le Maroc), passée en force de chose jugée et susceptible d’exécution ;

 

Si la décision émane d’une juridiction compétente selon les règles de droit international privé admise dans le pays où la décision est exécutée, sauf renonciation certaine de l’intéressé.

 

Mme X de conclure que les juges du fond en se bornant à énoncer d’une part que le jugement du tribunal marocain avait autorité de la chose jugée, sans pour autant rechercher si cette décision revêtait un caractère définitif et d’autre part ne contrevenait pas à l’ordre public français, la Cour d’Appel a violé l’article 16 de la convention franco-marocaine du 5 octobre 1957.

 

La Cour de Cassation écartent les moyens développés par Mme X et approuve la décision de la Cour d’Appel.

 

La Haute Cour, a considéré que la saisine de la juridiction marocaine par Mme X, emportait renonciation certaine de l’intéressée à se prévaloir des règles de droit international privé en vigueur en France pour contester la compétence de celle-ci.

 

La Cour de Cassation relèvera que la juridiction marocaine a rendu une décision de rejet pour défaut de diligence de la partie civile (Mme X et son fils ne se sont pas présentés aux opérations d’expertise médicale) et que dés lors cette décision ne revêtait pas le caractère d’un désistement mais d’une renonciation certaine à se prévaloir des règles de droit international privé en vigueur en France.

 

La Haute Cour de conclure que la Cour d’Appel en présence de cette renonciation certaine, n’avait pas à rechercher si la condition relative à la compétence avait été ou non remplie.

 

Voici ce qui a été jugé :

 

« Mais attendu que la saisine de la juridiction marocaine par Mme X.. valait renonciation certaine de l’intéressé à se prévaloir des règles de droit international privé en vigueur en France pour contester la compétence de celle-ci ; qu’ayant relevé, par motifs, adoptés,, que cette juridiction étrangère avait rendu une décision de rejet pour défaut de diligence de la partie civile et que cette décision ne revêtait pas le caractère d’un désistement et procédant par là-même à la recherche prétendument omise quant à la caractérisation de la condition figurant à l’article 16, sous c), de la convention franco-marocaine, la cour d’appel, qui n’avait pas à rechercher, en présence d’une renonciation certaine de l’intéressé, si la condition relative à la compétence, figurant au même article, sous a), était remplie, a légalement justifié sa décision de rejeter la demande des consorts X… au vu de l’autorité de la chose jugée attachée à la décision marocaine ; »

 

Geneviève FERRETTI

Vivaldi-Avocats

 

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