SOURCE : Cass, Com, 19 nov 2013. Pourvoi n° N 12-26.253 Arrêt n° 71 F-P+B
L’article L.131-73 du Code Monétaire et Financier énonce :
« Sous réserve des dispositions de l’article L. 312-1 relatives au droit au compte et aux services bancaires de base, le banquier tiré peut, après avoir informé par tout moyen approprié mis à disposition par lui le titulaire du compte des conséquences du défaut de provision, refuser le paiement d’un chèque pour défaut de provision suffisante. Il doit enjoindre au titulaire du compte de restituer à tous les banquiers dont il est le client les formules en sa possession et en celle de ses mandataires et de ne plus émettre des chèques autres que ceux qui permettent exclusivement le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés. Le banquier tiré en informe dans le même temps les mandataires de son client »
L’article précité met donc à la charge du banquier, teneur du compte à partir duquel un chèque sans provision a été émis, d’informer préalablement le tireur (son client) des conséquences du défaut de provision, et notamment le fait qu’il en refusera le paiement pour défaut de provision.
Ce texte constitue un traitement préventif, en ce qu’il invite le client à régulariser sa situation afin de ne pas connaître les affres de la mise en œuvre de la procédure d’interdiction bancaire.
La loi n’a cependant jamais précisé à qui incombe la charge de la preuve de cette obligation d’information.
Est-ce à la banque à justifier avoir adressé cette lettre d’information ou au client de prouver n’avoir jamais été rendu destinataire de ce courrier ?
La jurisprudence est venue pallier à ce silence, et notamment au travers de l’Arrêt présentement commenté.
En l’espèce, une banque a rejeté pour défaut de provision plusieurs chèques émis par une société. Cette dernière reproche à la banque d’avoir manqué à son obligation préalable d’information avant de rejeter ces chèques, et l’assigne en paiement de dommages-intérêts et en remboursement des frais de rejet.
La Cour d’Appel a condamné la banque à payer diverses sommes à la société en raison de ce manquement.
La Cour d’Appel pour justifier de sa décision relève que si la banque rapportait la preuve, qu’avant le rejet de chacun des chèques litigieux, elle avait rédigé et envoyé à la société une lettre intitulée « information préalable avant rejet du chèque, elle ne démontre pas que la société a bien reçu ces courriers.
La Cour de Cassation censure la Cour d’Appel et casse l’Arrêt.
Voici ce qui a été jugé :
« Attendu qu’en statuant ainsi, alors qu’il incombe seulement à l’établissement de crédit de prouver, lorsqu’il délivre l’information requise par l’article L.131-73 du Code Monétaire et Financier, qu’il l’a adressé au tireur avant le rejet du chèque en cause, la cour d’appel a violé les textes susvisés »
Cet arrêt pose le principe que la charge de la preuve pèse sur le banquier, débiteur de l’obligation légale d’information.
Pour autant, dans cet arrêt, la Haute Cour allège le fardeau de la preuve car, reprenant les dispositions de l’article L.131-73 précité, il impose à l’établissement de crédit de justifier qu’il a satisfait à son obligation d’information, sans pour autant exiger de ce dernier qu’il rapporte la preuve que le client a effectivement reçu le ou les courriers contenant cette information préalable.
Il semblerait donc qu’une lettre simple soit suffisante, mais avec le développement des modes d’information par voie électronique, tout laisse à penser que cette jurisprudence serait quelque peu désuète.
Mais, deux précautions valent mieux qu’une, informer par SMS, courriel son débiteur, c’est bien, mais lui confirmer cette information par lettre simple c’est beaucoup mieux et surtout plus probant.
Geneviève FERRETTI
Vivaldi-Avocats