Excès de pouvoir du Juge Commissaire pour absence d’audition du débiteur en matière de réalisation d’actif

Geneviève FERRETTI
Geneviève FERRETTI

SOURCE : Cass.Com.8 janvier 2013. Pourvoi n° C 11-26.059. Arrêt n° 14 F-P+B

 

On se souvient que la Cour de Cassation a strictement cantonné la recevabilité de l’appel nullité au seul excès de pouvoir[1], tout en appréciant la notion d’excès de pouvoir de manière très restrictive, puisque dans cette affaire elle a considéré que la violation du principe du contradictoire ne constitue pas un tel excès de pouvoir.

 

De même, elle avait jugé que ni la méconnaissance de la loyauté des débats, ni la violation de l’article 6 § 1 de la CEDH ne constituent un excès de pouvoir rendant recevables les recours nullité contre une décision de justice[2].

 

Toutefois, dans un arrêt du 16 juin 2009[3] la Haute Juridiction avait qualifié d’excès de pouvoir le fait pour un Juge, qui se prononce en matière de réalisation de l’actif du débiteur en liquidation judiciaire, de statuer sans que le débiteur ait été entendu ou dûment appelé.

 

C’est très exactement dans les mêmes termes que la Cour de Cassation rappelle cette solution dans le présent arrêt commenté, qui aura les honneurs d’une publication au Bulletin, sans doute parce que cet arrêt est rendu sous le régime des textes de 2005.

 

En l’espèce, après mise en redressement judiciaire puis liquidation judiciaire d’une débitrice, les 15 septembre et 17 novembre 2006, le 14 mai 2009, le Juge Commissaire a autorisé la vente aux enchères publiques de l’immeuble indivis appartenant à la débitrice et à son époux, sans la convoquer ou l’entendre.

 

Par jugement en date du 8 janvier 2010, le tribunal de commerce a rejeté son recours et a confirmé l’ordonnance autorisant la réalisation de l’actif immobilier.

 

Statuant sur l’appel interjeté par la débitrice, la Cour d’Appel de DOUAI dans son arrêt en date du 14 mai 2009 a déclaré l’appel nullité irrecevable, au motif que la débitrice n’avait élevé aucune critique de fond, elle ne démontre pas en quoi le tribunal aurait commis un excès de pouvoir.

 

La Cour d’Appel de DOUAI de poursuivre que s’il n’est pas contesté que la débitrice n’a pas été entendue ou appelée devant le juge commissaire, elle n’avait cependant pas soulevé la nullité de l’ordonnance devant le Tribunal de Commerce.

 

Au regard de cette argumentation, la Cour d’Appel de DOUAI en déduite que la procédure suivie devant le Tribunal de Commerce est contradictoire et qu’elle ne saurait être annulée.

 

Statuant sur le pourvoi formé par la débitrice, la Cour de Cassation casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt de la Cour d’Appel de DOUAI.

 

Voici ce qu’il est jugé :

« Attendu qu’en statuant ainsi, alors que le Juge-Commissaire, en excluant la débitrice du débat concernant le sort de son bien immobilier, avait commis un excès de pouvoir consacré par le Tribunal qui a méconnu son office en refusant de le sanctionner, la Cour d’Appel a violé les textes et les principes susvisés ».

 

Au travers de cet arrêt, la Cour de Cassation s’en tient à sa jurisprudence, considérant que la Cour d’Appel a violé les dispositions des articles 14 et L.623-5 du Code de Commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises et les principes (aujourd’hui L.661-5 du Code de Commerce) régissant l’excès de pouvoir.

 

Geneviève FERRETTI

Vivaldi-Avocats

 


[1] Cass. Ch.mixte, 28 janv 2005, n° 02-19.153, Bull.civ, n° 228, D.2006, p.545, obs. P.Julien et N. Fricero

[2] Cass. Com, 12 juill.2011, n° 09-71.764 : Bull.civ. IV, n° 120

[3] Cass. Com., 16 juin 2009, n° 08-13.565, Bull.civ. IV, n° 82

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