Directeur Général d’une SA : validité d’une clause contractuelle d’indemnisation forfaitaire en cas de révocation.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

 

SOURCE : Cass. com., 26 novembre 2013, n° 1126 F-D (n° 12-25.004).

 

Un Directeur Général fut recruté le 04 avril 2005 par une société d’économie mixte (SA) et signait le 07 avril avec le président de la société un document intitulé « lettre d’engagement valant contrat à durée indéterminée » qui prévoyait notamment qu’il pourrait être mis fin à tout moment aux fonctions du Directeur Général et que, dans ce cas, la société serait tenue de lui verser une indemnité égale à 12 mois de rémunération mensuelle.

 

Ayant été révoqué, le Directeur Général fit virer sur son compte une somme équivalent à ce montant. Mais la société le fit assigner pour faire déclarer nulle la stipulation, contenue dans l’acte du 07 avril 2005, lui octroyant une indemnité de cessation de fonctions et pour obtenir la restitution de cette somme.

 

Par suite, le Directeur Général révoqué formait une demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts pour révocation abusive.

 

La Cour d’Appel de PAPEETE, dans un Arrêt du 21 juin 2012, va accueillir la demande en remboursement formée par la société au motif que la procédure d’autorisation des conventions réglementées n’avait pas été suivie pour cette convention.

 

Par ailleurs, la Cour d’Appel va rejeter la demande reconventionnelle du Directeur Général révoqué dans la mesure où la lettre d’engagement précisait que sa révocation pouvait intervenir à tout moment, de sorte, selon elle, qu’elle n’avait pas à être motivée et qu’elle pouvait intervenir sans que la preuve d’une faute ou d’un grief ait été rapportée.

 

Ensuite de cette décision, le Dirigeant révoqué forme un pourvoi en Cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, l’ancien dirigeant fait grief à la Cour d’Appel d’avoir accueilli la nullité de la convention en raison de la méconnaissance des dispositions du Code de Commerce relatives à l’autorisation des conventions réglementées, prétendant que la nullité n’est encourue qu’à la condition que cette convention ait eu des conséquences dommageables pour la société, ce qui n’était pas établi en l’espèce et ce que la Cour d’Appel n’a pas recherché.

 

Mais la Haute Cour, relevant que par le simple fait que la société se retrouvait automatiquement débitrice d’une indemnité représentant une année de rémunération, cette stipulation avait nécessairement des conséquences dommageables pour la société.

 

Par suite, la Cour rejette le moyen dont il s’agit.

 

A l’appui de son pourvoi, l’ancien dirigeant fait encore grief à la Cour d’Appel d’avoir rejeté sa demande de dommages et intérêts pour révocation abusive, aux motifs que la lettre d’engagement du 07 avril 2005 précisait que la révocation était ad nutum, de sorte que la Cour en avait déduit que sa révocation n’avait pas à être motivée et qu’elle pouvait intervenir sans que la preuve de l’existence d’une faute ou d’un grief ait été rapportée et qu’en statuant ainsi, la Cour violait les dispositions de l’article 1134 du Code Civil.

 

La Haute Cour va accueillir cette argumentation.

 

Relevant qu’en statuant ainsi, alors que la lettre du 07 avril 2005 se bornait simplement à prévoir qu’il pourrait être mis fin à tout moment aux fonctions du Directeur Général, la Cour d’Appel en a dénaturé les termes clairs et précis et violé les dispositions de l’article 1134 du Code Civil.

 

Relevant en outre qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la révocation du dirigeant ne revêtait pas un caractère abusif, eu égard aux circonstances dans lesquelles elle était intervenue, la Cour d’Appel a, en outre, violé les dispositions de l’article 1382 du Code Civil.

 

Par suite, la Cour casse et annule l’Arrêt de la Cour d’Appel, mais seulement en ce qu’il a rejeté la demande du dirigeant révoqué tendant au paiement de dommages et intérêts.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

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