SOURCE : Cass Soc., 12 novembre 2015, Arrêt n° 1863 FS-P+B (n° 14-17.615).
Une salariée avait été engagée par une enseigne de la grande distribution dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à temps plein, le 20 octobre 2010 en qualité de responsable du rayon optique.
A ce titre, elle avait deux collaborateurs qui étaient placés sous sa responsabilité.
Le 16 avril 2011, la salariée a été convoquée à un entretien par le responsable des ressources humaines du magasin, lequel lui a reproché des difficultés de communication avec le personnel de son service, avec le personnel de l’entreprise de manière générale et enfin avec les clients.
Le même jour, le responsable RH soumettait à la signature de la salariée un document intitulé « compte rendu de l’entretien », document qu’elle va néanmoins contester par un courrier adressé à son employeur deux jours plus tard.
Toutefois, le 19 avril 2011, soit 3 jours après l’entretien, l’employeur convoquait la salariée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, l’entretien préalable étant assorti d’une mise à pied à titre conservatoire.
Un licenciement pour faute grave a ensuite été notifié à la salariée le 11 mai 2011.
Le 20 septembre 2011, la salariée a saisi le Conseil des Prud’hommes de LA ROCHE SUR YON, estimant que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et demandait la condamnation de l’employeur au paiement de diverses sommes.
Si le Conseil des Prud’hommes de LA ROCHE SUR YON va, dans un Jugement du 06 décembre 2012, faire droit aux demandes de la salariée, toutefois la Cour d’Appel de POITIERS, dans un Arrêt du 19 mars 2014, va réformer la décision des Premiers Juges.
Contrairement à la salariée qui considère que les motifs énoncés avaient déjà été pris en compte à l’occasion d’une précédente sanction disciplinaire prononcée le 16 avril 2011 par la lettre qui lui avait été remise le même jour, dont elle considère qu’il s’agissait de la notification d’une sanction au sens de l’article L.1331-1 du Code du Travail, la Cour d’Appel va considérer que le document intitulé « compte rendu d’entretien », s’il répond à la condition de fond et de forme posée par l’article L.1131-1 du Code du Travail, puisqu’il s’agit d’un écrit comportant des observations relatives à des comportements dont l’employeur lui faisait reproche, ne s’analysait cependant nullement en une mesure disciplinaire traduisant la volonté réelle de ce dernier de sanctionner un fait fautif, mais bien, comme son intitulé l’indiquait, en un compte rendu d’un entretien au cours duquel l’employeur avait énuméré divers griefs et insuffisances qu’il imputait à la salariée, ce qui n’avait pas eu pour effet d’épuiser le pouvoir disciplinaire de la société quant aux faits reprochés.
Par ailleurs, sur la qualification de la faute grave des problèmes liés à la communication relevés à l’encontre de la salariée, la Cour va relever que la salariée qui entretenait avec plusieurs de ses collègues des relations discourtoises et inadaptées qui ont eu pour effet, soit de troubler ces derniers, soit, en ce qui concerne l’une des salariées placées sous ses ordres, de porter atteinte à sa dignité et finalement à sa santé psychique, la Cour relevant que l’employeur est tenu à l’égard de ses salariés d’une obligations de sécurité de résultat, était fondé à prononcer le licenciement pour faute grave de la salariée, les griefs retenus et établis par l’employeur justifiant de la rupture immédiate du contrat de travail.
Ensuite de cette décision, la salariée forme un pourvoi en Cassation.
A l’appui de son pourvoi, elle reproche à l’Arrêt d’Appel d’avoir considéré que le courrier du 16 avril 2011 ne constituait pas une sanction, alors qu’il constatait que dans cet écrit l’employeur reprochait à la salariée son comportement en énumérant divers griefs qu’il lui imputaient, ce dont il résultait, selon la salariée, qu’il lui imputait des fautes et qu’en conséquence ce courrier constituait une sanction au sens de l’article L.1331-1 du Code du Travail.
Elle reproche également à l’Arrêt d’Appel d’avoir admis que l’employeur pouvait se fonder sur ledit compte rendu du 16 avril 2011 pour engager la procédure de licenciement et faire état, à l’appui du licenciement pour faute grave, des faits qui avaient déjà été évoqués dans le courrier du 16 avril 2011 et qu’il considérait comme fautifs, de sorte, qu’en faisant deux fois état des mêmes faits, l’Arrêt a entaché sa décision d’un défaut de base légale, au regard des dispositions de l’article L.1331-1 du Code du Travail.
Mais la Chambre Sociale ne va pas suivre la salariée dans son argumentation.
Relevant que le document rédigé par l’employeur n’est qu’un compte rendu d’un entretien au cours duquel il a été énuméré divers griefs et insuffisances qu’il imputait à la salariée sans traduire une volonté de sa part de les sanctionner, la Cour d’Appel a pu en déduire qu’il ne s’analysait pas en une mesure disciplinaire et n’avait donc pas eu pour effet d’épuiser le pouvoir disciplinaire de l’employeur.
Par suite, la Chambre Sociale rejette le pourvoi.
Christine MARTIN
Associée
Vivaldi-Avocats