Le juge du surendettement ne peut connaitre d’une clause de réserve de propriété.

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

 

SOURCE : Cass. Civ2., 24 septembre 2015, n°13-20996, n°1358 P+B+I

 

Saisie d’un dossier de surendettement, la commission homonyme déclare recevable le dossier qu’elle oriente vers un rétablissement personnel du débiteur en raison de la situation obérée de ce dernier.

 

A réception de l’avis de recevabilité et de la demande d’un décompte actualisé de la créance, une société de crédit forme un recours.

 

La société de crédit, ayant financé l’achat d’un véhicule automobile par les débiteurs, se prévaut de la clause de réserve de propriété figurant dans le contrat de vente.

 

En effet, la clause de réserve de propriété permet non seulement à un créancier de s’assurer qu’il sera payé du prix de la chose vendue, mais également d’éviter le concours des autres créanciers. La chose vendue demeure la propriété du vendeur jusqu’au complet paiement du prix. Cette clause permet au créancier d’être, par la suite, subrogé dans les droits du vendeur ce qui permet la restitution du bien.

 

Bien que le juge déclare recevable la contestation formulée, il la rejettera au motif que la clause de réserve de propriété insérée au contrat n’a pas été établie par un acte notarié conformément à l’article 1250 du Code civil[1].

 

La société de crédit forme alors un pourvoi en cassation. Le créancier argue que la subrogation dans le bénéfice de la clause de réserve de propriété n’est soumise à aucun formalisme et que par conséquent, la sanction du non-respect du formalisme est l’inopposabilité aux tiers.

 

La Cour de cassation casse la décision concernant la demande de restitution du véhicule au visa de l’article 330-1 du Code de la consommation sans examiner la clause de réserve de propriété. La Haute Cour rappelle que « lorsque le créancier recevant son paiement d’une tierce personne la subroge dans ses droits, actions, privilèges ou hypothèques contre le débiteur, cette subrogation, qui doit être expresse et faite en même temps que le paiement, n’est soumise à aucun formalisme ».

 

De plus, la Cour vient encadrer les pouvoirs du juge du surendettement en rappelant qu’ « en matière de surendettement, il ne peut connaître d’une demande de restitution formulée au titre d’une clause de réserve de propriété, le juge du tribunal d’instance, excédant ses pouvoirs ».

 

La Cour s’était déjà prononcée sur la clause de réserve de propriété et sur le devenir du transfert de propriété d’un bien touché par un tel plan.

 

En effet, la Haute Cour, en date du 27 février 2014[2], a jugé que les dettes sont effacées par la procédure de surendettement. L’effacement ne valant pas paiement, le transfert de propriété n’a pas lieu au profit de l’acquéreur puisque la condition suspensive n’est pas réalisée.

 

Un créancier pourra ainsi se prévaloir d’une clause de réserve de propriété en dépit de l’effacement de la dette de son débiteur. Elle conservera ainsi toute son efficacité malgré la recevabilité en commission de surendettement.

 

Jacques-Eric MARTINOT

Vivaldi-Avocats

 


[1] Article 1250 du Code civil : « Cette subrogation est conventionnelle :

1° Lorsque le créancier recevant son paiement d’une tierce personne la subroge dans ses droits, actions, privilèges ou hypothèques contre le débiteur : cette subrogation doit être expresse et faite en même temps que le paiement ;

2° Lorsque le débiteur emprunte une somme à l’effet de payer sa dette, et de subroger le prêteur dans les droits du créancier. Il faut, pour que cette subrogation soit valable, que l’acte d’emprunt et la quittance soient passés devant notaires ; que dans l’acte d’emprunt il soit déclaré que la somme a été empruntée pour faire le paiement, et que dans la quittance il soit déclaré que le paiement a été fait des deniers fournis à cet effet par le nouveau créancier. Cette subrogation s’opère sans le concours de la volonté du créancier.  »

[2] Cass.Civ2., 27 février 2014, n°13-10891, n°310 P + B

 

 

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