Transfert de la charge de la sûreté en plan de cession

Etienne CHARBONNEL
Etienne CHARBONNEL - Avocat associé

 

 

Source : Cass. Com. 29 septembre 2015, pourvoi n°14-17.946, n°845. D.

 

L’article L642-12, al.4 du Code de Commerce est bien connu de tous les professionnels des procédures collectives.

 

Il constitue la « tarte à la crème » de toute reprise, et le piège à éviter pour tout repreneur.

 

Il dispose en effet : « Toutefois, la charge des sûretés immobilières et mobilières spéciales garantissant le remboursement d’un crédit consenti à l’entreprise pour lui permettre le financement d’un bien sur lequel portent ces sûretés est transmise au cessionnaire. Celui-ci est alors tenu d’acquitter entre les mains du créancier les échéances convenues avec lui et qui restent dues à compter du transfert de la propriété ou, en cas de location-gérance, de la jouissance du bien sur lequel porte la garantie. Il peut être dérogé aux dispositions du présent alinéa par accord entre le cessionnaire et les créanciers titulaires des sûretés. »

 

En synthèse, en cas de plan de cession, le cessionnaire qui reprend un bien grevé d’une sûreté, garantissant le financement de l’acquisition de ce bien, est tenu de reprendre l’encours du prêt, ainsi que la sûreté.

 

Plus précisément, il est tenu d’acquitter au prêteur les sommes prévues par le tableau d’amortissement initial, à hauteur du capital restant dû… au jour de la reprise. Le repreneur ne paye donc pas les sommes échues impayées, mais uniquement les sommes à échoir.

 

Sauf meilleur accord avec le prêteur.

 

Et tel était le cas en l’espèce : l’acquéreur et la banque conviennent d’une reprise seulement partielle du prêt… et la banque vient chercher les cautions en paiement pour le surplus.

 

La méthode paraît quand même suspecte : la banque a toutes latitudes pour négocier avec l’acquéreur puisqu’elle sait que toute concession de sa part sera récupérée sur les cautions. Il s’agit donc uniquement pour elle de s’assurer de la reprise du fonds, pour chercher à se rembourser auprès de deux sources : l’acquéreur qui reprend une partie de l’encours, et la caution qui paye la différence.

 

Les cautions, dans l’espèce commentée, vont d’ailleurs se défendre, et soulever deux arguments intéressants :

 

       Il est d’abord soutenu que l’accord trouvé avec l’acquéreur constitue une novation du contrat et que la banque a définitivement renoncé à se prévaloir de la différence entre l’encours initial et le montant négocié. L’argument est sans surprise écarté par la Cour de Cassation, qui rappelle que la novation doit être expresse.

 

       Ensuite, il est soutenu que le créancier aurait dû procéder à une inscription modificative du nantissement pour pouvoir l’opposer au cessionnaire. A défaut d’y avoir procédé, les cautions ont perdu le bénéfice de la subrogation, ce qui doit entraîner leur décharge à même hauteur. La Cour, là encore, rejette le moyen, et rappelle sa solution antérieure selon laquelle la transmission de la charge du nantissement s’effectue de plein droit, sans intervention du créancier.

 

Aucune nouveauté, mais des rappels intéressants, repris sous un angle d’approche inédit.

 

Etienne CHARBONNEL

Vivaldi-Avocats

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