Sort du créancier d’une procédure collective situé dans un autre Etat Membre de l’UE.

Eric DELFLY
Eric DELFLY - Avocat associé

 

Sources : CJUE, 3e ch., 19 sept. 2013, aff. C-251/12, Christian Van Buggenhout et Ilse Van de Mierop, ès qual. c/ Banque Internationale à Luxembourg SA

 

I-

 

Des syndics belges d’une procédure d’insolvabilité demandent à une banque luxembourgeoise le paiement d’un avoir initial de la débitrice faillie, que la banque a déjà payé à un tiers contre la présentation d’un chèque émis en exécution d’un ordre donné par la débitrice faillie avant l’ouverture de la procédure d’insolvabilité.

 

La banque ne veut pas payer une deuxième fois aux syndics de la procédure d’insolvabilité et se retranche derrière l’article 24 du règlement n° 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000[1], relatif aux procédures d’insolvabilité, qui protège la bonne foi de celui qui, dans l’ignorance de l’ouverture de la procédure d’insolvabilité, exécute une obligation au profit du débiteur failli, alors qu’il ne pouvait désormais exécuter valablement ladite obligation qu’au profit du syndic de cette procédure

 

II-.

 

La Cour relève que suivant le libellé de la disposition dont l’interprétation est sollicitée, les personnes protégées par cette disposition sont les débiteurs du débiteur failli qui soit directement, soit par intermédiation exécutent de bonne foi une obligation en faveur de ce dernier.

 

Elle ajoute qu’il importe que cette disposition ne soit pas interprétée dans un sens qui permette que la masse soit également diminuée des avoirs que le débiteur failli doit à des créanciers. En effet, si une telle interprétation était suivie, le débiteur failli pourrait, en faisant exécuter, par des tiers qui ignorent l’ouverture de la procédure d’insolvabilité, des obligations qu’il a envers un créancier, déplacer des avoirs de la masse vers ce créancier et ainsi porter atteinte à l’un des principaux objectifs du règlement n° 1346/2000, énoncé au considérant 4 de celui-ci et consistant à éviter que les parties ne soient incitées à déplacer des avoirs d’un État à un autre en vue d’améliorer leur situation juridique.

 

III-

 

Il résulte de l’ensemble de ces considérations et aux objectifs poursuivis qu’une situation telle que celle au principal, dans laquelle le débiteur failli a, par intermédiation, exécuté une obligation envers l’un de ses créanciers, ne relève pas du champ d’application de ladite disposition. Toutefois, la circonstance que l’article 24, § 1, du règlement n° 1346/2000 est inapplicable à une situation telle que celle au principal n’entraîne pas, en soi, l’obligation pour la banque concernée de restituer la somme litigieuse à la masse des créanciers. La question de la responsabilité éventuelle de cette banque est régie par la loi nationale applicable.

 

La CJUE décide que « L’article 24, paragraphe 1, du règlement, relatif aux procédures d’insolvabilité, doit être interprété en ce sens que ne relève pas du champ d’application de cette disposition un paiement fait, sur l’ordre d’un débiteur soumis à une procédure d’insolvabilité, à un créancier de celui-ci ».

 

Tout le monde à compris …dans cette hypothèse la banque paye deux fois .

 

Eric DELFLY

Vivaldi-Avocats



[1] Article 24 : Exécution au profit du débiteur

 

1. Celui qui, dans un État membre, exécute une obligation au profit du débiteur soumis à une procédure d’insolvabilité ouverte dans un autre État membre, alors qu’il aurait dû le faire au profit du syndic de cette procédure, est libéré s’il ignorait l’ouverture de la procédure.

2. Celui qui a exécuté cette obligation avant les mesures de publicité prévues à l’article 21 est présumé, jusqu’à preuve contraire, avoir ignoré l’ouverture de la procédure d’insolvabilité; celui qui l’a exécutée après ces mesures de publicité est présumé jusqu’à preuve contraire, avoir eu connaissance de l’ouverture de la procédure.

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