SOURCE : CA AIX EN PROVENCE (8° Chambre A), 13 décembre 2012, n° 2012/785 (n° 11/16034).
Dans cette espèce, une SARL, dont le capital social n’était que de 1 000 €, avait enregistré de lourdes pertes au titre d’un exercice, de sorte qu’elle envisageait de réunir l’Assemblée Générale Extraordinaire des associés en vue d’une augmentation de capital d’un montant de 46 000 €, à souscrire au prorata des parts détenues par chacun des associés.
Cette Assemblée Générale fut convoquée et tenue pendant l’absence de l’associé fondateur, détenteur de 23 % du capital social, de sorte qu’à son retour de l’étranger, celui-ci constatait que la décision de l’Assemblée Générale Extraordinaire avait eu pour conséquence de réduire sa participation de 23 % du capital à 0,49 % du capital social dans la mesure où il n’avait pas pu souscrire à cette augmentation de capital.
Par suite, l’associé a sollicité en justice l’annulation de cette délibération, demandant la convocation d’une nouvelle Assemblée Générale en faisant valoir qu’il était absent et se trouvait en Polynésie à la date de l’assemblée pour raisons professionnelles mais que, pendant cette absence, il avait continué à communiquer avec la société par voie de courriels et avait, en particulier, demandé que l’on attende son retour pour prendre toute disposition juridique ou financière engageant l’avenir de la société.
Toutefois, le Tribunal de Commerce de CANNES, dans un Jugement du 08 septembre 2011, rejetait sa demande, relevant que le demandeur avait prolongé son séjour à l’étranger de manière importante et qu’il n’était pas établi que ses coassociés connaissaient ses dates d’absence et par suite sa date de retour, et qu’en conséquence il ne pouvait être invoqué que l’Assemblée Générale litigieuse ait été convoquée sciemment afin de lui porter préjudice ou de l’évincer du capital social de la société.
Ensuite de cette décision, l’associé interjette appel et c’est ainsi que la Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE, dans l’Arrêt précité du 13 décembre 2012, annule l’Assemblée Générale Extraordinaire ayant décidé du principe et des modalités de l’augmentation de capital litigieuse, enjoignant la société de réunir régulièrement dans les 6 semaines de la signification de l’Arrêt une nouvelle Assemblée Générale avec le même ordre du jour.
A l’appui de sa décision, la Cour d’Appel relève les faits suivants :
– Il était établi, par la copie des billets d’avion, que l’associé se trouvait en Polynésie pendant la période du 25 février 2011 au 20 avril 2011. La Société ne l’ignorant pas lui avait expliqué qu’une visioconférence pouvait être organisée, de sorte qu’elle ne pouvait prétendre ignorer l’absence de l’associé et qu’elle devait avoir à tout le moins des doutes sérieux quant à la présence de celui-ci à la date prévue pour la réunion de l’Assemblée Générale Extraordinaire.
– Malgré tout, la société avait convoqué l’associé à son domicile parisien en vue de l’assemblée devant statuer sur l’augmentation de capital et avait ouvert, et clos, le délai de souscription pendant l’absence de l’associé, de sorte qu’à son retour de Polynésie celui-ci ne pouvait que constater que l’ensemble des décisions entérinant l’augmentation de capital avait été pris en son absence.
– Les courriels échangés par la société et l’associé, alors que celui-ci trouvait en Polynésie portaient sur la situation financière de celle-ci et sur le principe d’une augmentation de capital, de sorte qu’en l’absence de précision sur son retour, la société s’était abstenue de l’informer par la même voie de la convocation de l’Assemblée Générale.
Par suite la Cour en déduit que l’assemblée avait été intentionnellement réunie afin de spolier l’associé puisque la période de souscription était achevée à son retour et la souscription à l’augmentation de capital déjà constatée, ce qui constituait une fraude manifeste justifiant l’annulation de l’Assemblée Générale litigieuse.
Arrêt intéressant de la Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE à double titre, tout d’abord en ce qu’il donne un nouvel exemple de ce qui peut être considéré comme un comportement fautif justifiant la nullité d’une Assemblée Générale et en ce qu’il affirme le principe selon lequel la communication par voie électronique est considérée comme tout à fait valide au regard des rapports entre associés et au regard du mode de communication de la convocation d’un associé à l’Assemblée Générale (ce qui ne dispense pas, bien entendu d’une convocation formelle).
Christine MARTIN
Associée
Vivaldi-Avocats