Résiliation judiciaire du contrat de travail d’un salarié protégé prononcée aux torts de l’employeur suite à une rupture conventionnelle annulée par l’autorité administrative.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

SOURCE : Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 15 mai 2019,         n° 17-28.547 (F-P+B).

 

Un salarié a été engagé par une entreprise par contrat à durée indéterminée du 30 juin 2008 en qualité de chef de projet sénior, le 30 juin 2012, le salarié ayant été promu directeur de projet.

 

Ce salarié a été élu membre du Comité d’Entreprise le 05 juin 2011 et membre du CHSCT le 06 mars 2012.

 

L’employeur et le salarié ont signé le 28 novembre 2012 un formulaire de rupture conventionnelle, document qui a été adressé par l’entreprise le 14 décembre 2012 afin de solliciter l’autorisation de l’Inspecteur du Travail.

 

Par décision du 21 janvier 2013, l’Inspecteur du Travail a autorisé la rupture conventionnelle du contrat de travail du salarié, mais le 20 mars 2013, le salarié formait un recours hiérarchique contre la décision d’autorisation de la rupture conventionnelle du 21 janvier 2013, laquelle va être annulée par décision du 18 juillet 2013 par le Ministère du Travail.

 

Ensuite de cette décision, l’employeur proposait au salarié sa réintégration dans un poste de chef de projet pour une rémunération mensuelle équivalente à celle perçue antérieurement.

 

Toutefois, le salarié, considérant qu’on lui offrait un poste inférieur à celui qu’il occupait précédemment, saisissait le Conseil des Prud’hommes afin d’obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur.

 

En cause d’appel, la Cour d’Appel de PARIS, dans un Arrêt du 23 novembre 2017, va considérer que l’employeur a failli à son obligation de réintégration en proposant au salarié un poste de chef de projet, sans autre précision que celle qu’il s’agissait d’un poste disponible, et que l’employeur ne rapportait pas la preuve de son impossibilité de réintégrer le salarié sur un poste de directeur de projet équivalent à celui exercé au moment de la rupture, ce manquement étant suffisamment grave pour interdire la poursuite des relations contractuelles et justifie la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’entreprise.

 

En conséquence, condamnant l’employeur au versement de diverses sommes indemnitaires, elle condamne notamment l’entreprise à verser au salarié, au titre de la violation de son statut protecteur, une indemnité égale à la rémunération qu’il aurait dû percevoir jusqu’à l’expiration de la période de protection en cours au jour de sa demande, soit pour la période de novembre 2013 à janvier 2016.

 

Ensuite de cette décision, l’employeur forme un pourvoi en Cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, il prétend que la rupture n’était pas intervenue en méconnaissance du statut protecteur puisque la rupture du contrat de travail du salarié avait été autorisée par l’Inspecteur du Travail, de sorte qu’il ne pouvait être condamné à verser au salarié une indemnité pour violation du statut protecteur.

 

Mais la Chambre Sociale ne va pas suivre l’employeur dans son argumentation.

 

Enonçant que le salarié protégé, dont la rupture conventionnelle est nulle en raison de l’annulation de l’autorisation administrative, doit être réintégré dans son emploi ou dans un poste équivalent, qu’il en résulte que lorsque l’employeur n’a pas satisfait à cette obligation sans justifier d’une impossibilité de réintégration, la résiliation judiciaire prononcée aux torts de l’employeur pour ce motif produit les effets d’un licenciement nul pour violation du statut protecteur, de sorte que c’est à bon droit que l’Arrêt d’appel a considéré que le salarié pouvait prétendre à une indemnité au titre de la méconnaissance de son statut protecteur égale à la rémunération qu’il aurait perçu depuis la date de son éviction jusqu’à la fin de la période de protection dans la limité de 30 mois.

 

Par suite, la Chambre Sociale rejette le pourvoi.

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