Marché public et délit de favoritisme

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

 

SOURCE : Cass.crim, 5 décembre 2012, n°12-80032, Inédit

 

Aux termes de l’article 432-14 du Code pénal, « Est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30000 euros d’amende le fait par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou investie d’un mandat électif public (…)de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d’accès et l’égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public. »

 

Un Maire avait conclu avec 4 sociétés dirigées par un membre de sa famille, les contrats d’entretien des espaces verts de la commune.

 

La Cour d’appel de Fort de France l’a reconnu coupable de l’infraction de favoritisme et l’a condamné à une peine d’emprisonnement avec sursis,  d’amende et d’interdiction des droits civiques, civils et de famille. Pour ce faire, les juges du fond ont retenu :

– S’agissant de l’élément matériel, qu’aucune publicité légale ni mise en concurrence  n’avait été faite par la commune, enfreignant ainsi l’article 1er du Code des marchés publics ;

– S’agissant de l’élément intentionnel, que le contrat était passé avec 4 sociétés dont le dirigeant était de la famille du maire, pour des montants supérieurs aux prix couramment pratiqués, alors que  la situation économique de la commune était catastrophique.

 

Le Maire s’est pourvu en cassation, alléguant que, conformément aux dispositions de l’article 432-14 du Code pénal,  l’infraction de favoritisme n’est constituée que lorsqu’un acte contraire aux dispositions législatives ou règlementaires est commis, en l’espèce, une mise en concurrence. Or, selon le Maire, le montant des différents contrats n’obligeait pas la commune à recourir à l’appel d’offre.

 

La Chambre Criminelle de la Cour de cassation n’est pas de cet avis : Puisque les contrats avaient  tous pour objet la fourniture de produits d’entretien et d’articles ménagers, il fallait additionner ces montants pour déterminer les seuils d’appel d’offre (conformément au code des marchés public). En l’occurrence, la mise en concurrence était obligatoire.

 

Les principes fondamentaux de l’article 1er du Code des marchés public, (ayant d’ailleurs valeur constitutionnelle[1]), relatif au libre accès à la commande publique et à l’égalité des candidats, n’ayant pas été respectés, la Haute juridiction rejette le pourvoi.

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats



[1] Cons. const., 26 juin 2003, no 2003-473 DC, Dr. adm. 2003, comm. 188, note Ménéménis A., Contrats marchés publ. 2003, chron. 18, note Linditch F., AJDA 2003, p. 1391, note Schoettl J.-E.

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