Le formalisme de la demande en revendication

Etienne CHARBONNEL
Etienne CHARBONNEL - Avocat associé

 

Source : Cass. Com. 12/03/2013 n°11-24.729, n°263 P+B

 

 

La jurisprudence de la Cour de Cassation s’étoffe d’une nouvelle décision cruelle pour le créancier d’une société en procédure collective. Ce nouvel exemple de la longue course d’obstacle que constitue l’exercice de ses droits par le créancier porte cette fois sur la demande en revendication.

 

En l’espèce, un créancier, suite à l’ouverture de la procédure collective de son cocontractant, l’avait mis en demeure de se prononcer sur la poursuite d’un contrat de location de matériel. Au titre de ce courrier, le créancier rappelait que la résiliation du contrat entraînerait nécessairement l’obligation de restitution immédiate dudit matériel.

 

Copie de la correspondance était adressée dans le même temps au mandataire judiciaire.

 

A défaut de réponse du débiteur, le créancier présente une requête en revendication devant le Juge Commissaire, laquelle requête est rejetée par les Juges du fond pour tardiveté de la demande.

 

La question dès lors soumise à la Cour de Cassation est la suivante : la lettre valait-elle demande en revendication ?

 

Si le terme de revendication n’était à priori pas utilisé dans la lettre du créancier, cette revendication semblait sous entendue, notamment dans la mesure où la reconnaissance du droit de propriété emporte de manière constante exercice du droit de restitution.

 

Ce n’est pourtant pas l’analyse de la Cour de Cassation qui note que si la revendication peut s’exercer en même temps que l’interrogation sur la poursuite du contrat en cours, cette revendication doit être non équivoque, et doit nécessairement inviter le débiteur à se prononcer sur le droit de propriété du créancier revendiquant.

 

En l’espèce, le créancier a, en quelque sorte, raté une étape, ou simplement sous entendu une étape, de sorte que la haute juridiction a considéré qu’il n’y avait point eu de revendication.

 

Cette décision peut être rapprochée des nombreuses jurisprudences existant en matière de déclaration de créance : pour être valablement accueillie comme telle, une déclaration de créance doit être non équivoque, et manifester clairement l’intention du créancier de faire valoir ses droits dans le cadre de la procédure collective.

 

C’est ainsi que, indépendamment de la recevabilité liée à l’identification de l’auteur de la déclaration, l’envoi, par le créancier, d’un extrait de sa comptabilité récapitulant la dette du débiteur, ne pouvait valablement s’interpréter comme une déclaration de créance, alors même qu’un tel extrait de comptabilité n’est pas envoyé par hasard au mandataire judiciaire : l’envoi répond en effet le plus souvent à l’interpellation du mandataire judiciaire, qui invite l’ensemble des créanciers à déclarer leur créance. En répondant à l’invitation d’avoir à déclarer, par l’envoi d’une copie de factures, l’intention de déclarer est, à tout le moins, sous-entendue.

 

Insuffisant, selon la Cour de Cassation.

 

Etienne CHARBONNEL

Vivaldi-Avocats

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