Gérant de SARL : il ne peut être personnellement tenu pour responsable d’un trouble anormal de voisinage causé par la société.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Cour d’Appel de NANCY du 04 juin 2013, n° 12/00627.

 

Dans cette espèce, le voisin d’une station de lavage automobile exploitée par un garage, se plaignant des nuisances sonores résultant de l’usage de la station de lavage, avait fait assigner personnellement le gérant de la société en invoquant un trouble anormal de voisinage, pour voir interdire, sous astreinte, le fonctionnement de la station de lavage et obtenir le paiement de dommages et intérêts.

 

Un rapport d’expertise ayant mis en évidence que le fonctionnement de la station de lavage générait des bruits d’un niveau supérieur au seuil réglementaire défini par le Code de la Santé Publique, le gérant de la société fut déclaré responsable du préjudice subi par son voisin, condamné à l’indemniser et condamné à prendre des dispositions nécessaires à la cessation du trouble sonore. Le gérant, mis en cause à titre personnel, interjeta appel des Jugements rendus invoquant que l’action engagée contre lui était irrecevable, n’étant pas l’exploitant de l’activité litigieuse puisque celle-ci était exploitée par la société dont il était le gérant, ce qui n’avait pas été vérifié par le demandeur à l’action avant d’agir.

 

Il souligne que le fait d’être porteur de parts de la société ne l’a pas rendu propriétaire de la station de lavage, qu’il n’a aucun droit sur le patrimoine de la société, de sorte que le trouble anormal de voisinage reproché à la société ne pouvait lui être imputé personnellement en sa qualité d’associé, ni de gérant, ce d’autant que l’activité de lavage, entrant bien dans l’objet social de la société, n’était pas exploité par lui en propre.

 

Il en conclut donc que la violation prétendue des dispositions du Code de la Santé Publique quant aux nuisances sonores n’est pas séparable de ses fonctions de gérant.

 

De son côté, le demandeur à l’action prétendait que le gérant n’avait pas, en première instance, discuté sa qualité à défendre, avait présenté une défense,  participé aux opérations d’expertise judiciaire et avait en outre poursuivi la procédure en admettant exploiter, concluant en son nom personnel, de sorte qu’il avait pu en déduire que celui-ci était un exploitant individuel et non pas le représentant d’une personne morale.

 

Face à ces argumentations et appréciant l’ensemble des circonstances de faits soumis à sa Juridiction, la Cour d’Appel de NANCY, dans l’Arrêt précité du 04 juin 2013, applique un raisonnement juridique imparable pour déclarer irrecevable l’action dirigée personnellement à l’encontre du gérant de la société.

 

Relevant qu’il résulte des extraits Kbis communiqués que la SARL, exploitant le garage dont il s’agit, avait été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 30 novembre 1992 et avait débuté son exploitation le 1er octobre 1992 et que le défendeur était d’ores et déjà son gérant, lequel n’avait jamais été inscrit au registre du commerce et des sociétés au titre d’une exploitation personnelle, que cette station de lavage dont l’activité entrait logiquement dans le cadre des activités de la SARL, de sorte qu’il ne pouvait en être retiré que le défendeur exploitait à titre personnel l’activité de station de lavage.

 

Soulignant à nouveau qu’une société immatriculée a une personnalité juridique différente de son dirigeant, qui ne peuvent être confondues, que celle-ci a également un patrimoine propre qui n’est pas celui de ses associés, que les troubles anormaux de voisinage invoqués par le demandeur sont uniquement liés à l’activité commerciale exercée par la SARL par le biais des installations lui appartenant, de sorte que cette dernière était seule à pouvoir mettre en œuvre des mesures destinées à mettre fin auxdits troubles anormaux de voisinage et seule tenue à indemnisation du préjudice subi desdits troubles, de sorte que le demandeur ne pouvait se prévaloir d’un intérêt à agir contre le gérant à titre personnel sur le fondement des troubles anormaux de voisinage et qu’en conséquence, son action sur ce fondement était irrecevable.

 

Par ailleurs, la Cour déclare également irrecevable l’intervention forcée de la SARL en cause d’appel, en raison de sa tardiveté, n’étant en outre justifiée par aucune évolution du litige.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

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