Contrat mal exécuté, connexité et compensation

Etienne CHARBONNEL
Etienne CHARBONNEL - Avocat associé

 

 

Source : Cass. Com. 27 janvier 2015, Pourvoi n°13-18656 F-P+B

 

Le mécanisme de la compensation entre créances connexes revêt une importance pratique tout à fait fondamentale, dans le cadre des procédures collectives.

 

En effet, il n’est pas rare que deux cocontractants aient, dans le cadre de leurs relations commerciales, des créances et des dettes réciproques. Lorsque l’une de deux sociétés est placée en procédure collective et tout particulièrement lorsqu’il s’agit d’une liquidation, le cocontractant in bonis a tout intérêt à faire constater la compensation entre les dettes et créances qu’il détient sur l’autre société, afin de ne pas avoir à payer ses propres dettes, et se faire, dans le même temps opposer le mécanisme de l’arrêt des poursuites individuelles l’empêchant ainsi de recouvrer ses créances.

 

Le Code de Commerce, dans toutes ses versions successives (L.621-24 avant la loi de sauvegarde, puis L.622-7 depuis), prévoit que la compensation entre créances connexes est une exception à la règle de l’arrêt des poursuites.

 

Toute la difficulté est donc de déterminer quelles sont les créances connexes dans le cadre d’une relation commerciale et/ou contractuelle plus complexe.

 

L’arrêt ici commenté vient apporter une précision qui, si elle n’est pas nouvelle, n’est pas toujours bien appliquée par les juridictions du fond. En l’espèce, une compagnie aérienne avait souffert d’une surfacturation des prestations d’assistance facturées par la Chambre de Commerce et d’Industrie du Var, gestionnaire d’un aérodrome, sur lequel la Compagnie aérienne était installée. Postérieurement à la résolution du plan, et au prononcé de la liquidation de la compagnie, le liquidateur introduit une action à l’encontre de la CCI, pour obtenir une indemnisation, estimant que la déconfiture de la société était en grande partie due aux coûts excessifs pratiqués par la CCI.

 

Le liquidateur est suivi par les juridictions du fond, qui condamnent la CCI.

 

Pour autant, cette dernière avait valablement déclaré au passif de la compagnie aérienne, une créance, et la CCI invoque le principe de la compensation entre sa créance et sa dette.

 

La Cour d’Appel, en suite de la juridiction de 1er degré, avait refusé la compensation pour dettes connexes, estimant que la surfacturation était décorellée, selon l’arrêt ayant condamné la CCI, des services effectivement fournis à la compagnie aérienne, de sorte que la dette résultant de la condamnation était étrangère à la relation contractuelle normale entre les parties.


La Cour de Cassation casse l’arrêt, retenant que la créance résultant d’une exécution défectueuse d’un contrat est bien connexe avec les créances nées de l’exécution normale de celui-ci.

 

La solution déjà posée dans d’autres matières, est régulièrement reprise par la Cour de Cassation méritait une piqûre de rappel, dans le cadre plus spécifique des procédures collectives.

 

Etienne CHARBONNEL

Vivaldi-Avocats

Print Friendly, PDF & Email
Partager cet article