Associé minoritaire : le décret précisant les nouvelles modalités de consultation a été publié

Laurent Turon
Laurent Turon

 

SOURCES :

Ordonnance n° 2017-747 du 4 mai 2017

Décret 2018-146 du 28 février 2018

 

L’ordonnance du 4 mai 2017 portant diverses mesures faciles à entendre la prise de décisions et la participation des actionnaires au sein des sociétés, avait autorisé un ou plusieurs associés détenant 5 % des parts sociales d’une SARL à faire inscrire comme dans les SA les points du projet de résolutions à l’ordre du jour de n’importe quelles assemblées[1]. L’article 12 du décret pris en application de ce texte, s’appliquera aux assemblées convoquées à compter du 1er avril 2018.

 

Ainsi, lorsqu’un associé veut user de la faculté de faire inscrire un point ou un projet de résolutions à l’ordre du jour d’une assemblée, il peut demander à la société par lettre simple ou recommandée, ou par courrier électronique (attention au droit de la preuve) de l’avaliser selon ces modalités de la date prévue pour la réunion de l’assemblée.

 

La société est tenue d’envoyer cet avis par lettre simple ou recommandée, si l’associé lui a adressé le montant des frais d’envoi de cette lettre, ou par un courrier électronique à l’adresse qu’il a indiquée[2].

 

L’article R 223-20-2 du Code de Commerce ne fixe aucun délai de réponse, mais la jurisprudence ne manquera pas de préciser que l’associé de la société est tenu d’aviser l’associé dans un délai raisonnable. Si la société indique par exemple que l’assemblée doit se tenir dans les 25 jours, l’associé ne pourra pas exercer son droit puisque l’article R 223-20-3 alinéa 1 dispose que pour être recevable, la demande d’inscription à l’ordre du jour doit être adressée (date d’envoi) à la société par LRAR ou courrier électronique avec accusé de réception, 25 jours au moins avant la date de l’assemblée.

 

L’article R 223-20 du Code de Commerce tel que modifié par l’article 2 du décret, précise que la société peut recourir à la communication électronique en lieu et place d’un envoi postal pour satisfaire aux formalités mises à sa charge, notamment par l’article R 223-20-3. On fera évidemment le parallèle sur l’obligation de motivation de la demande à l’ordre du jour, entre la SA et la SARL.

 

Cependant, dès lors que les conditions de forme et de fond ont été respectées par le minoritaire, l’inscription du projet de résolutions s’impose à la gérance qui ne peut se faire juge de leur opportunité. Il s’ensuit que les projets de résolutions adressés par les minoritaires doivent être soumis au vote de l’assemblée[3].

 

On peut évidemment se poser la question de l’intérêt de cette extension du droit aux porteurs de parts jusque-là réservée aux actionnaires. Trois sources d’intérêts peuvent être dégagées, mais il s’agit ici d’une liste non exhaustive :

 

Tout d’abord, le représentant légal de la société ne contrôle pas forcément la société au sens de l’article L 233-3 (majorité en capital) ou L 233-10 du Code de Commerce (majorité des droits de vote), de sorte que l’on peut imaginer que par cette demande d’inscription à l’ordre du jour, le minoritaire à l’origine de la demande d’inscription à l’ordre du jour, souhaite interpeller d’autres associés dont les votes cumulés emporteraient la majorité ;

 

On peut également imaginer des projets de résolutions sous forme de procédure d’alerte, destinée à inviter l’assemblée à procéder à telle ou telle action comme la nécessité de transiger dans un litige dangereux où la société prend trop de risques, ou au contraire, provisionner tel ou tel risque, etc. ;

 

Enfin, le rejet d’une résolution présentée par un minoritaire peut être le contexte à asseoir une action en abus de majorité.

 

Eric DELFLY

VIVALDI-Avocats


[1] Le texte est inséré à l’article L 223-27 alinéa 5 du Code de Commerce

[2] Désormais art. R 228-20-2 du Code de Commerce

[3] Art. 223-20-3 alinéa 2 et suivants

 

 

 

 

 

 

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