Un modèle-type de bâtiment protégeable par le droit d’auteur

Diane PICANDET
Diane PICANDET - Avocat

 

 

(Cour d’Appel de Paris, pôle 5, 2ème ch. 22 juin 2012 RG 2011/06079)

 

Un architecte renommé prétendait avoir crée en 1995 un modèle de maison dénommé « maison papillon » sur  lequel il avait concédé une licence à plusieurs sociétés.

 

Après avoir découvert qu’une société reproduisait son modèle, il a assigné cette dernière en contrefaçon.

 

Par jugement en date du 3 février 2011, le Tribunal de grande instance de Meaux a débouté le demandeur de son action pour défaut d’originalité du modèle.

 

La Cour d’Appel infirme le jugement.

 

Sur la recevabilité à agir

 

Dans la présente affaire, le demandeur n’avait déposé aucun modèle auprès de l’INPI. Il devait donc rapporter la preuve de sa qualité d’auteur contestée comme il se doit par la défenderesse.

Par une appréciation souveraine, les juges ont considéré que le requérant avait rapporté la preuve de sa qualité d’auteur au vu des éléments suivants:

– un document intitulé concept d’assemblage d’une cellule d’habitation qui comportait des explicitations du modèle, le nom et l’adresse, ainsi que la mention du nom de l’auteur suivi de la mention « modèle déposé à l’INPI n°48880 » 

– des maquettes réalisées à partir du plan-type

– des enveloppes Soleau datées et numérotées

– un contrat de licence désignant le demandeur en tant que concepteur du modèle

– divers articles de presse

– une correspondance de son assistante informant le demandeur d’une reproduction illégale de son modèle

– une photographie d’une maison commercialisée par une société sous licence présentant sa production  sous le titre « modèle T. »

 

 

Sur le caractère original du modèle

 

Les juges du fond ont considéré que l’œuvre revendiquée était dénuée de toute originalité au motif qu’elle se limitait à reproduire des plans sans se caractériser par des éléments architecturaux tels que toiture, façade, matériaux, agencement des pièces.

 

En l’espèce, l’œuvre revendiquée répondait à la définition du modèle-type qui est un projet de bâtiment  défini avant toute commercialisation au moyen de plans et de documents descriptifs dont le maître d’ouvrage et le terrain ne sont pas connus au moment de la conception.

 

La Cour retient l’originalité du modèle-type élaboré par le demandeur  au motif :

« Qu’il apparaît que l’agencement des masses dicté par le croisement de diagonales en un espace central, l’adaptabilité recherchée de la construction afin de l’insérer dans l’environnement et de gagner en fonctionnalité ou l’esthétique particulière des façades et toitures induite par la disposition des différents corps de la construction, dans la combinaison revendiquée, ne peuvent être considérés comme contraints ou se bornant à emprunter au fonds commun de l’architecture mais procèdent de choix délibérés et d’un parti-pris esthétique, se retrouvant tant dans le modèle type précisément élaboré ainsi que dans les variantes proposées, qui imprègnent l”uvre de la personnalité de leur auteur »

 

Elle ajoute que :

 

« Que la société intimée qui ne justifie ni même ne fait état de l’existence d’œuvres antérieures à 1996 reproduisant, dans la même combinaison, l’ensemble des caractéristiques revendiquées et qui, par ailleurs, n’est pas fondée à se prévaloir des directives du maître de l’ouvrage, par hypothèse inconnu dans le cadre des modèles types ci-avant définis, dès lors qu’elles ne se substituent pas à l’apport créatif de l’architecte n’est, par conséquent, pas fondée en sa contestation de l’originalité de l”uvre litigieuse  »

 

Rappelons que les œuvres des architectes  tels que les plans, croquis (CPI, L.122-2 12ème) mais également l’œuvre architecturale en elle-même sont éligibles à la protection par le droit d’auteur pour autant qu’elles présentent un effort créatif, une recherche esthétique personnelle reflétant la personnalité de leur auteur.

 

Sont dépourvues d’originalité les œuvres qui sont la reproduction banale de types d’édifices largement répandus à travers le territoire.

 

Traditionnellement, les juges sont réticents à reconnaître l’originalité de plans plutôt que celle d’un édifice.

 

Diane PICANDET

VIVALDI Avocats

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