SOURCE :
Tribunal administratif de Lyon, 17 novembre 2015, n°1303301, C+ ;
Tribunal administratif de Lille, 15 mars 2016, n°1302956, C+.
Les premiers juges ont fait une première application positive de l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme, issu de l’ordonnance du 18 juillet 2013, qui permettent au bénéficiaire du permis de construire d’obtenir des dommages et intérêts de la part du requérant dont le recours « excède la défense de ses intérêts légitimes », et a causé au bénéficiaire du permis un « préjudice excessif ».
Dans l’espèce soumise au Tribunal administratif de Lyon, les premiers juges ont considéré que les deux conditions de l’article L. 600-7 précité étaient remplies.
Sur la première condition liée au caractère abusif du recours, plusieurs éléments venaient présumer de ce que la requête n’était pas justifiée par la défense d’intérêts légitimes.
En effet, l’intérêt à agir des huit requérants prêtait largement à discussion, dès lors que pour la plupart, plusieurs étaient installés à une distance telle qu’ils ne pouvaient se prévaloir de la qualité de voisin invoquée. Par ailleurs, ce n’était de manière que très tardive que leur intérêt à agir avait été établi lors de l’instance, alors que celui-ci doit en principe être établi au stade de l’introduction de la requête.
Au surplus, la requête avait été articulée sur un ensemble de nombreux moyens dont le bien-fondé, la recevabilité et même l’opérance prêtaient également à discussion, ce qui tendait à devoir considérer la requête comme étant dilatoire.
Le caractère dilatoire du recours était d’autant plus avéré que les requérants avaient adressé la veille de l’audience des écritures volumineuses, la tardiveté d’une telle transmission ne pouvant se justifier en l’espèce que par le souci de prolonger artificiellement l’instance.
Sur la seconde condition liée au préjudice excessif, le bénéficiaire du permis faisait valoir la situation d’insécurité juridique créée par le recours, et son incidence sur le calendrier de réalisation du projet et le coût de l’opération.
Précisément, le bénéficiaire faisait valoir que le gel du chantier avait occasionné différents frais et surcoûts, ainsi que la perte de loyers du fait de retard dans la mise en location des logements.
Sur ce point, les juges ont considéré que devaient être prise en charge au titre d’un préjudice excessif :
– le coût du portage financier depuis la date de la mise en location initialement prévue jusqu’à la date de lecture du jugement, qui constitue un surcoût « qui excède les aléas auxquels [les requérants] pouvaient être exposés dans le cadre de la conduite de leur projet immobilier] ;
– la hausse du taux de la TVA passé de 19,5% à 20% qui constitue un surcoût « qui excède les aléas auxquels ils pouvaient être exposés dans le cadre de la conduite de leur projet immobilier » ;
– les pertes de revenus locatifs imputables de manières excessive au dépôt du recours, de sorte que les délai induits par le cours et l’instance sont pris en compte au titre du préjudice excessif induit par le recours.
Dans l’espèce soumise par la suite au Tribunal administratif de LILLE, les juges ont estimé que le recours excédait la défense des intérêts légitimes du requérant.
L’instruction du dossier faisait apparaître en effet que l’essentiel des moyens manquaient en fait, et qu’en outre, le requérant avait durant l’instance cédé sa parcelle sans se désister pour autant de son action.
Aussi, et dans la mesure où le recours litigieux avait conduit à un report d’ouverture du chantier, et donc par suite, à l’annulation de contrats de réservation de parcelles, causant ainsi un préjudice excessif au bénéficiaire, le requérant a ainsi été condamné à verser des dommages et intérêts d’un montant de 5000 euros.
Stéphanie TRAN
Vivaldi-Avocats