Modification du motif de contestation d’une déclaration de créance à hauteur d’appel

Etienne CHARBONNEL
Etienne CHARBONNEL - Avocat associé

 

 

Source : Cass. Com. 19 mai 2015, Pourvoi n°14-14.395 n°455 P+B

 

L’article 564 du Code de Procédure Civile dispose que « les parties ne peuvent soumettre à la Cour (d’appel) de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait. »

 

Cet article est complété par l’article 565 qui précise quant à lui que « les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. »

 

Ces règles procédurales viennent ici s’appliquer dans le cadre du contentieux de la déclaration de créance.

 

La Cour de Cassation avait déjà jugé, sous l’empire des dispositions applicables antérieurement à la loi de Sauvegarde, que le débiteur était fondé à ajouter ou modifier les motifs de contestation à hauteur d’appel lorsqu’il s’était contenté, en première instance, de contester la régularité de la déclaration de créance et qu’il présentait pour la première fois en appel, des motifs de contestation sur le fond[1], ou inversement lorsqu’il n’avait discuté en première instance que le fond de la créance et qu’il soulevait pour la première fois à hauteur d’appel des motifs de contestation sur la régularité de celle-ci[2].

 

Cette possibilité était, selon la doctrine ayant analysé les arrêts, fondée sur les dispositions de l’article 565 du Code de Procédure Civile cité plus haut, dans la mesure où tous les motifs tendaient à la même fin : le rejet de la créance et sa conséquence, l’extinction de la créance.

 

Toute la difficulté est que la loi de Sauvegarde a modifié le sort de la créance rejetée dans le cadre de la vérification de passif, selon les motifs. En effet :

 

       Si la créance est rejetée sur le fond, elle est éteinte ;

 

       Si elle n’est rejetée que sur la forme (recevabilité de la créance), la créance est dès lors inopposable à la procédure collective mais n’est pas éteinte.

 

De sorte que la doctrine s’était interrogée sur la transposition, sous l’empire des dispositions de la loi de sauvegarde, des jurisprudences précitées, dans la mesure où les motifs de contestation formés pour la première fois à hauteur d’appel, ne tendaient pas à la même fin.

 

L’arrêt de Cassation commenté, répond à cette question.

 

La Cour de Cassation, par une formulation très large, ne faisant plus référence à l’article 565 du Code de Procédure Civile, déclare recevable les motifs de contestation nouveaux formés pour la première fois en cause d’appel.

 

En l’espèce, le débiteur avait contesté, en première instance, la déclaration de créance formée par sa banque, uniquement s’agissant du caractère privilégié ou non de la créance.

 

Ce n’est qu’à hauteur d’appel qu’il présente pour la première fois, les contestations sur le fond de la créance (calcul d’intérêt).

 

La Cour de Cassation avait déclaré irrecevable les arguments nouveaux, considérant qu’il s’agissait là de demandes nouvelles, ne tendant pas aux mêmes fins.

 

La Cour de Cassation casse l’arrêt d’appel.

 

Ainsi, et désormais, il faut considérer que, dès lors qu’une contestation, quel qu’en soit le motif, a été formulé devant le Juge-Commissaire, tout motif nouveau, quel qu’il soit, est recevable même s’il n’est présenté pour la première fois qu’à hauteur d’appel.

 

Etienne CHARBONNEL

Vivaldi-Avocats

 


[1] Cass Com. 24 juin 2008 Pourvoi n°07-15.681 n°731 D

[2] Cass Com 4 février 2003 Pourvoi n°99-17.859, n°230 P

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