Les dirigeants et associés de société ne sont pas nécessairement des cautions averties

Thomas LAILLER
Thomas LAILLER

 

Source : Cass. com., 22 mars 2016, n°14-20.216, F-P+B

 

En l’espèce, une société conclut plusieurs crédit-baux avec une banque. En garantie de ces opérations, les dirigeants et associés de la société se portent cautions solidaires. Malheureusement la société fait ensuite l’objet d’une procédure collective, et les cautions sont assignées en paiement par la banque. A titre reconventionnel, les cautions recherchent la responsabilité de l’établissement de crédit pour manquement à son devoir de mise en garde.

 

En défense, la banque argue de la qualité de cogérants associés des cautions, de sorte qu’elles ne pouvaient ignorer la portée de leur engagement au moment de sa signature. Les juges du fond accueillent favorablement cette argumentation, et déboute les cautions de leurs demandes, qui notamment n’apportent pas la preuve du défaut de mise en garde par la banque.

 

Un pourvoi en cassation est formé par les cautions.

 

La Cour régulatrice casse et annule l’arrêt d’appel, au motif adopté que le caractère avertie d’une caution ne peut pas se déduire simplement de sa qualité de dirigent et/ou associé de la société cautionnée. La Haute juridiction poursuit en précisant que la charge de la preuve de l’obligation de mise en garde ne pèse pas sur la caution, mais bien sur la banque.

 

Pour que le caractère averti d’une caution dirigeante et/ou associée, il faut également prouver une implication importante de la caution dans la gestion courante de la société[1], une expérience suffisante du dirigeant[2].

 

Il faut noter toutefois qu’être dirigeant de la société depuis longtemps ne suffit pas à caractériser une caution avertie. De la même façon, il a été récemment jugé que la circonstance qu’un dirigeant de société entretenait des relations avec la banque pour la tenue des comptes de la société était impropre à établir qu’il était un emprunteur averti[3].

 

En d’autres termes, des éléments concrets doivent montrer que l’intéressé a pu mesurer la portée juridique et financière de son engagement de caution. Par exemple, la Cour de cassation a récemment retenu qu’était une caution avertie une gérante de société qui avait déclaré, dans une étude qu’elle avait fournie à la banque :

 

– Être titulaire d’un BEP secrétariat ;

 

– Avoir exploité un commerce de vêtements pendant trois ans ;

 

– Avoir été responsable de magasin pendant trois ans ;

 

– Vendeuse de prêt-à-porter pendant quatre ans et animatrice de vente pendant six ans ;

 

– Avait dressé, en connaissance du secteur et de l’activité, un plan de financement et un prévisionnel des ventes, ensuite exécuté pendant dix-huit mois et dont il n’était pas démontré qu’il n’était pas viable.[4]

 

Thomas LAILLER

Vivaldi-Avocats


[1] Cass. com., 11 avr. 2012, n°10-25.904, F-P+B ; Cass. Civ. 1ère, 3 juill. 2013, n°12-16.655

[2] Cass. com., 5 févr. 2013, n°11-26.262

[3] Cass. civ. 1ère, 12 nov. 2015, n°14-21.706

[4] Cass. com., 5 mai 2015, n°14-10.834

 

 

 

 

 

 

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