SOURCE : Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 12 juillet 2018, n° 17-13.029 (F-D).
Un salarié avait été engagé, à compter du 14 janvier 2008, par une société exerçant une activité de prestations de services dans le domaine du traitement contre les insectes et animaux nuisibles, par un contrat à durée indéterminée en qualité de chargé des opérations, l’entreprise appliquant la convention collective de la désinfection, désinsectisation et dératisation.
Le salarié a été promu directeur d’agence à compter du 1er janvier 2009, puis à compter du 12 janvier 2010, responsable des agences Pôle MONTPELLIER – TOULOUSE.
A compter du 1er avril 2010, le salarié s’est vu adjoindre les fonctions de directeur régional du Pôle Sud-Ouest.
Le salarié a été convoqué par courrier recommandé avec accusé de réception le 25 novembre 2011 à un entretien en vu d’un éventuel licenciement fixé au 07 décembre 2011.
Le 12 décembre 2011, la société notifiait au salarié son licenciement pour cause réelle et sérieuse avec dispense d’exécution de son préavis d’une durée de 3 mois, par une lettre lui reprochant un certain nombre de griefs et notamment une attitude dilettante très déstabilisante pour le personnel, une information insuffisante du personnel, des insuffisances dans le soutien, le suivi et le développement des collaborateurs, des promesses non tenues auprès des collaborateurs, des attitudes et propos déplacés, voire méprisants envers le personnel et des directives contraires à l’optique de la société.
Contestant le bienfondé de son licenciement, le salarié a saisi le Conseil des Prud’hommes de MONTPELLIER lequel, dans un Jugement du 09 janvier 2015, a considéré que le licenciement prononcé reposait sur une cause réelle et sérieuse.
Le salarié ayant interjeté appel du Jugement, cette affaire arrive par-devant la Cour d’Appel de MONTPELLIER laquelle, dans un Arrêt du 14 décembre 2016, examinant précisément chacun des griefs énoncés dans la lettre de licenciement, va considérer qu’aucun d’entre eux n’est justifié et ne permettait de justifier le licenciement prononcé à l’encontre du salarié, de sorte qu’elle condamne l’entreprise à indemniser le salarié pour un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Au titre des rappels de salaire, le salarié avait formulé une demande concernant l’indemnisation des astreintes qu’il estimait avoir assumées dans le cadre de ses fonctions, faisant valoir qu’occupant les fonctions de chef d’agence, il devait en permanence laisser son téléphone portable allumé pour répondre aux sollicitations de ses subordonnées ou clients, qu’il donnait des consignes à ses subordonnés, réglant à chaque fois la situation à distance, de sorte qu’il demande le règlement de la prime d’astreinte forfaitaire prévue par l’article 26 de la convention collective applicable, prétendant que l’absence de dispositions relatives aux astreintes dans son contrat de travail et le fait qu’il était soumis à un forfait annuel en jour, n’était pas de nature à dispenser l’employeur du règlement de cette astreinte.
La Cour, quant à elle, va estimer qu’il ressort du document intitulé « procédure de gestion des appels d’urgence » que les coordonnées des directeurs d’agence ou des superviseurs/chefs d’équipe étaient communiquées à la société en charge de la gestion des appels d’urgence qui devait les appeler à réception d’un appel et que ces directeurs d’agence ou superviseurs/chefs d’équipe devaient alors prendre les mesures adéquates.
La Cour relève que ce dispositif était en vigueur pour toute période située en dehors des heures et jours de travail et que les personnels concernés devaient laisser en permanence leur téléphone portable allumé, de sorte qu’elle en déduit qu’à partir du moment où le salarié avait été promu directeur d’agence le 1er janvier 2009, il avait l’obligation de rester en permanence disponible à l’aide de son téléphone portable pour répondre à d’éventuels appels et se tenir prêt à intervenir en cas de besoin, ce qui constituait une astreinte, de sorte qu’elle lui alloue les indemnités y afférant.
Ensuite de cette décision, l’employeur forme un pourvoi en Cassation relativement à la problématique de l’astreinte.
A l’appui de son pourvoi, l’employeur prétend que l’astreinte prévue par la convention collective constitue une période où le salarié doit assurer une permanence téléphonique à son domicile ou à proximité, reprochant à la Cour d’Appel de ne pas avoir caractérisé, à aucun moment, que le salarié était soumis à une obligation de tenir une permanence téléphonique à son domicile.
Mais la Chambre Sociale ne va pas suivre l’employeur dans son argumentation.
Relevant qu’en application d’un document intitulé « procédure des gestions des appels d’urgence », les coordonnées des directeurs d’agence étaient communiquées à la société en charge des appels d’urgence et que ces directeurs d’agence devaient, en cas d’appel, prendre les mesures adéquates et qu’à partir du moment où le salarié a été promu directeur d’agence sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, il avait l’obligation de rester en permanence disponible à l’aide de son téléphone portable pour répondre à d’éventuels besoins et se tenir prêt à intervenir en cas de besoin, la Cour d’Appel a fait une exacte application des dispositions de la convention collective et légalement justifié sa décision.
Par suite, la Chambre Sociale rejette le pourvoi.
Christine MARTIN
Associée
Vivaldi-Avocats