ICPE : En cas de dépassement d’un seuil d’autorisation, l’exploitant doit régulariser sa situation

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

 

SOURCE : CE, 8 juillet 2016, n°390160, Inédit au recueil LEBON

 

Certaines activités susceptibles de porter atteinte à l’environnement doivent être autorisés, enregistrées ou déclarées, suivant notamment, la quantité de matières « dangereuse » utilisée dans le cadre de l’exploitation. Une même activité peut ainsi relever du régime de la déclaration dans la limite de l’utilisation d’un certain seuil de matière, ou de l’autorisation, lorsque ce seuil est franchi.

 

Une entreprise utilisait dans le cadre de son exploitation un produit relevant de la nomenclature ICPE n°2940, soumis à déclaration lorsque la quantité utilisée est inférieure à 100 kg par jour, et à l’autorisation au-delà.

 

L’entreprise avait ainsi déclaré son activité, qui s’était manifestement développée, entrainant, lors de la visite d’inspection du site, une consommation journalière de produit excédant le double du seuil d’autorisation.

 

Sur le fondement de l’article L514-1 puis L514-2 du Code de l’environnement, devenu l’article L171-7 dudit Code, le Préfet a mis en demeure l’exploitant de déposer un dossier d’autorisation d’exploitation et de se conformer aux prescriptions afférentes à ce nouveau régime, dans un délai de douze mois, dont le non respect peut entrainer la fermeture ou la suppression des installations, l’exécution forcée, une peine d’amende, etc.

 

Un jugement du 28 mai 2013, confirmé par la Cour administrative d’appel de DOUAI, a annulé l’arrêté préfectoral, considérant que les pouvoirs coercitifs du préfet ne pouvaient s’exercer que contre un exploitant procédant à un changement d’activité assimilable à une nouvelle activité n’ayant donné lieu ni à autorisation ni à déclaration

 

La position surprenante des juges du fond se déduit d’une précédente décision du Conseil d’Etat selon laquelle l’article L514-2 « est applicable aux installations classées exploitées sans avoir fait l’objet de la déclaration ou de l’autorisation requises, à l’encontre de la société requérante, alors même qu’elle avait reçu deux récépissés de déclaration, dès lors que celle-ci exerçait d’autres activités que celles au titre desquelles ces récépissés lui avaient été délivrés ». La Cour d’appel de DOUAI avait sans doute estimé que seules les activités non déclarées dans le cadre d’une rubrique déterminée de la nomenclature permettaient au Préfet d’exercer ses pouvoirs coercitifs.

 

Il n’en est rien, entrainant l’annulation, pour erreur de droit, de la décision par le Conseil d’Etat : le franchissement de seuil qui n’est suivi d’aucune démarche administrative doit être assimilé au cas extrême d’exploitation d’une ICPE à l’insu des services de la Préfecture.

 

On rappellera à cet égard que lorsque l’activité exploitée est susceptible de ne plus correspondre à celle figurant dans les éléments du dossier initial de déclaration, le préfet doit en être avisé préalablement, conformément à l’article R512-54 du Code de l’environnement. Le Préfet aurait ainsi contraindre l’exploitant à adapter son activité à la déclaration obtenue[1] ou se référer à cette disposition réglementaire pour justifier son arrêté, puisque le franchissement de seuil, doit faire l’objet d’une nouvelle déclaration ou plutôt, d’une autorisation.

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats



[1] CE, 6/2 SSR, 15 mars 1999, n°162037, Inédit au recueil LEBON

 

 

 

 

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