Fusion de sociétés et poursuites pénales : quand l’article 121-1 du Code Pénal tient en échec le principe de la transmission universelle du patrimoine.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

   

SOURCE : Cass Soc., 25 octobre 2016, Arrêt n°16-80.366 – (FS-P+B)

 

Un médecin biologiste a porté plainte et s’est constitué partie civile contre un laboratoire de biologie venant aux droits d’un autre laboratoire par effet d’une fusion-absorption pour offre, par une entreprise assurant des prestations produisant ou commercialisant des produits pris en charge par des régimes obligatoires de sécurité sociale, d’avantages en nature ou en espèces à des auxiliaires médicaux.

 

Le Juge de l’Instruction ayant mis en examen de ce chef la société absorbante, cette dernière a déposé une contestation de la recevabilité de la constitution de partie civile, puis a déposé une requête tendant à ce que soit rendue une Ordonnance de non-lieu en sa faveur au motif que l’action publique serait éteinte en raison de la fusion-absorption de la société ayant commis les actes incriminés, seule personne morale mise en cause.

 

La Chambre de l’Instruction de la Cour d’Appel de RENNES, dans un Arrêt du 18 décembre 2015, va décider que conformément à la décision du 05 mars 2015 de la Cour de Justice de l’Union Européenne (affaire C-343/13), dont il ressort que la fusion-absorption entraine la transmission, à la société absorbante, de la responsabilité pénale de la société absorbée par l’obligation de payer une amende infligée après la fusion pour des infractions commises par la société absorbée avant la fusion, il doit être considéré au cas présent que la fusion absorption, en l’absence de liquidation a eu pour effet de transférer, en les confondant, le patrimoine et la personnalité juridique de l’absorbée à l’absorbante, ce qui entraîne la transmission de la responsabilité pénale.

 

Au cas d’espèce, les Juges ajoutent que cette transmission est d’autant plus avérée que les caractéristiques de l’opération de fusion-absorption d’une filiale par sa société mère, dont les dirigeants et biologistes travaillaient dans les deux structures, à la fois en tant qu’associés et dirigeants, de sorte que les personnes en cause pouvaient ignorer les agissements commis au sein de la société absorbée.

 

La Chambre de l’Instruction en déduit donc que la responsabilité pénale de l’absorbante est susceptible d’être engagée dans l’infraction commise par la société absorbée dans les termes de la mise en examen qui lui avait été signifiée.

 

Ensuite de cette décision, la société absorbante forme un pourvoi en Cassation.

 

Bien lui en prit, puisque la Chambre Criminelle énonçant que selon l’article 121-1 du Code Pénal qui dispose que « nul n’est responsable pénalement que de son propre fait », et que cet article ne peut s’interpréter que comme interdisant que des poursuites pénales soient engagées à l’encontre de la société absorbante pour des faits commis par la société absorbée avant que cette dernière perde son existence juridique, peu important l’interprétation faite par la Cour de Justice de l’UNION EUROPEENNE dans son Arrêt du 05 mars 2015 de la troisième directive 78/855/CEE du Conseil du 09 octobre 1978 concernant les fusions des sociétés anonymes, puisque celle-ci est dépourvue d’effet direct à l’encontre des particuliers.

 

Par suite, la Chambre Criminelle casse et annule l’Arrêt d’Appel sur ce point particulier.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

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