Famille de marque, la Cour de Cassation résiste

Diane PICANDET
Diane PICANDET - Avocat

 

 

Source : Cass. Com., 3 juin 2014, n°13-17769

 

Le bras de fer continue entre les instances nationales et les juridictions européennes sur les familles de marques.

 

Il est fréquent que la marque emblématique d’une entreprise évolue au fil du temps et des modes et donnent lieu à des dépôts multiples.

 

Ces marques vont être au fur et à mesure délaissées et encourir alors la déchéance pour défaut d’exploitation.

 

L’article 714-5 du CPI prévoit toutefois que n’encourt pas la déchéance le titulaire qui fait usage de sa marque sous une forme modifiée à condition qu’elle n’en altère pas le caractère distinctif.

 

Les juridictions nationales ont été saisies du point de savoir si en présence de marques présentant des différentes insignifiantes l’exploitation d’une seule permettait aux autres d’échapper à la déchéance.

 

Dans un arrêt d’assemblée plénière de 1992, la Cour de Cassation avait répondu par la négative.

 

Un revirement va être opéré par trois arrêts de principe de la chambre commerciale du 14 mars 1996 :

 

(…) l’arrêt retient que cette société ne justifie pas de l’exploitation de ces marques par leur exploitation sous une forme modifiée, dès lors que cette forme modifiée correspond à une marque déposée, et qu’en déposant plusieurs marques différentes, la société Finaxa qui a souhaité disposer de plusieurs droits de propriété incorporelle ne peut en conséquence protéger ces marques par l’exploitation d’une autre à laquelle sont attachés des droits spécifiques

 

Attendu qu’en statuant ainsi, alors que le texte précité exige seulement que la marque exploitée diffère de la marque première et non exploitée par des éléments n’en altérant pas le caractère distinctif, peu important que la marque modifiée ait été elle-même enregistrée.

 

Aux termes de cette décision, la Cour suprême considérait donc que l’exploitation d’une seule variante permettait aux autres marques de la famille d’échapper à la déchéance.

 

En 2007, sous l’influence de la jurisprudence européenne (TPICE, CJCE) qui va juger a contrario que l’exploitation d’une variante ne peut couvrir le défaut d’exploitation des autres marques d’une famille, les juridictions nationales vont s’affranchir des arrêts de 2006.

 

Dans la présente espèce, la Cour de Cassation réaffirme sa position.

 

La Cour d’Appel avait prononcé la déchéance partielle de deux marques verbales en retenant qu’en déposant plusieurs marques, la société Cofra avait entendu les distinguer de sorte qu’il lui incombait de justifier de l’usage sérieuse qu’elle a fait de chacune d’elles et que la protection dont bénéficiait sa marque semi-figurative ne pouvait s’étendre à ses deux marques verbales.

 

La Chambre commerciale casse l’arrêt au visa de l’article 15 du Règlement CE 207/2009 et de l’article L.714-5 du CPI : «  qu’en statuant ainsi alors que les textes susvisés exigent seulement que la marque exploitée ne diffère des marques enregistrées que par des éléments n’en altérant pas le caractère distinctif, peu important que la marque modifiée ait été elle-même enregistrée. »

 

La jurisprudence nationale semble poser.

 

Diane PICANDET

Vivaldi-Avocats

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