Les FAI, bientôt indemnisés pour leur contribution auprès de l’Hadopi

Virginie PERDRIEUX
Virginie PERDRIEUX

 

SOURCE : Conseil d’Etat, 2ème/7ème SSR, décision du 23 décembre 2015, Bouygues Télécom

 

Les fournisseurs d’accès à internet (FAI) se sont vus imposés de plus en plus d’obligations de la part des autorités françaises pour contribuer à la lutte contre la cybercriminalité.

 

L’article L.334-1 II du Code des postes et des communications électroniques impose notamment aux FAI de différer pour une durée maximale d’un an leurs opérations tendant à effacer ou rendre anonymes certaines catégories de données techniques, pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales, dans le but de permettre la mise à disposition de l’autorité judiciaire d’informations concernant les internautes.

 

Un décret d’application en date du 24 mars 2006 est légitimement venu fixer les modalités de compensation des surcoûts résultant des prestations effectuées par les opérateurs en exécution de réquisitions judiciaires.

 

Cependant, aucune disposition similaire n’a été prise pour compenser les frais engagés par les FAI pour répondre aux demandes de l’Hadopi tendant à l’identification des adresses IP des abonnés, dans le cadre du système de riposte graduée contre les atteintes aux créations sur Internet mis en place par la loi n°2009-669 du 12 juin 2009.

 

Depuis 2010, des négociations ont été engagées, sans succès, entre l’Etat et les sociétés France Télécom, Bouygues Télécom, Free et Numericable pour trouver un accord quant à l’indemnisation devant compenser leurs coûts d’exploitation, suite aux demandes de l’Hadopi.

 

La société Bouygues Télécom, après avoir reçu une décision implicite du Premier Ministre, rejetant sa demande du 21 mars 2014, tendant à l’édiction d’un décret d’application de la loi du 12 juin 2009 et à l’octroi de dommages et intérêts pour retard fautif, a saisi le Conseil d’Etat du litige.

 

Aux termes de sa décision du 23 décembre 2015, le Conseil d’Etat a ordonné au Gouvernement d’édicter ce décret dans un délai de six mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, aux motifs suivants :

 

« Considérant que les dispositions de la deuxième phrase du III de l’article L.34-1 du code des postes et des communications électroniques relatives à la compensation des surcoûts identifiables et spécifiques des prestations assurées à la demande de la Hadopi par les opérateurs ne peuvent, en raison de leur généralité, recevoir application sans qu’un décret en précise les modalités ;

que dans ces conditions, ces dispositions ne laissent pas à la libre appréciation du Premier ministre l’édiction du décret dont elles prévoient l’intervention  »

 

La Haute juridiction a entendu par la même occasion rappeler à l’ordre le Gouvernement, en indiquant qu’en dépit des difficultés rencontrées par l’administration pour l’élaboration de ce texte et de la durée nécessaire à la conduite des consultations et des discussions engagées par elle avec les opérateurs pour identifier les surcoûts, le délai raisonnable au terme duquel le décret aurait dû être adopté était largement dépassé.

 

Concernant la demande d’indemnisation de son préjudice également soulevée par la société Bouygues Télécom, le Conseil d’Etat a décidé de surseoir à statuer en raison d’une nécessaire actualisation de l’évaluation de son préjudice, lequel devrait s’élever a minima à 10 millions d’euros.

 

Virginie PERDRIEUX

Vivaldi-Avocats

 

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