Droit social et management des ressources humaines

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

  

Touchant à la RSE (responsabilité sociale des entreprises, ou parfois responsabilité sociale et environnementale), la discussion était centrée sur 3 domaines au croisement de l’éthique, du management et du droit :

 

Lanceurs d’alertes

 

« Employabilité » et formation

 

Nouveaux comportements au travail

 

En préambule il a été rappelé que les codes d’éthique, qui permettent d’expliciter les comportements attendus, n’ont pas en soi de force obligatoire. C’est le règlement intérieur qui permet de prévoir d’éventuelles sanctions pour les infractions commises

 

A) Concernant les lanceurs d’alertes

 

Le terme de lanceur d’alerte a été inventé dans les années 1990, il est inspiré du terme anglo-saxon « wistleblower », littéralement « celui qui donne un coup de sifflet ».

 

Cela signifie que le lanceur d’alerte signale un danger ou un risque dans un but d’intérêt général, voulant susciter une prise de conscience de la communauté et du pouvoir en place. C’est ce qui le distingue du dénonciateur et du délateur. Par ailleurs, en agissant, il se met en danger.

 

En France, deux lois de 2013 viennent protéger les lanceurs d’alerte :

 

– Loi 2013-316 du 16 avril 2013, sur les risques sanitaires ou environnementaux : les lanceurs d’alerte salariés sont protégés contre toute discrimination professionnelle en cas de dénonciation de tels risques.

 

– Loi 2013-1117 du 6 décembre 2013 sur la fraude fiscale, la délinquance économique et financière : les lanceurs d’alerte sont protégés en matière de crimes et délits en entreprise mais aussi dans l’administration, en cas de dénonciation de bonne foi.

 

Dans l’UE, hormis la France, seuls 4 pays ont institué une législation complète en matière de protection des lanceurs d’alerte : Royaume Unis, Luxembourg, Roumanie et Slovénie.

 

B) Concernant l’employabilité et la formation, le lien avec l’éthique a été évoqué à deux niveaux, la responsabilité concernant les compétences (acquisition et mise en œuvre), et la qualité du dialogue social.

 

En soi, la notion d’employabilité met l’accent sur la capacité des personnes à accéder à des emplois, l’employeur ayant un rôle à jouer pour faciliter cette accession.

 

La responsabilité est partagée entre le salarié (qui ne doit pas être passif) et l’entreprise, sachant que la formation fait l’objet d’obligations juridiques. En effet l’employeur doit assurer l’adaptation des salariés à leurs postes, et veiller au maintien de cette capacité.

 

Le salarié doit suivre les formations avec assiduité (un salarié qui refuse sans raison valable de suivre une formation nécessaire commet une faute)

 

Mais l’éthique concerne aussi le dialogue social, dans la mesure où l’employeur doit informer, consulter, voire négocier avec les IRP, surtout sur les enjeux d’évolution et de devenir de l’entreprise.

 

Il est souvent considéré comme éthiquement souhaitable d’être clair sur les orientations stratégiques, et la façon dont elles influencent la formation professionnelle, ainsi que de tenter de négocier (par ex un accord de Gpec).

 

Quant à la réforme concernant la formation professionnelle (promulguée le 5/3/14, suite de l’ANI du 14/12/13), elle prévoit notamment des entretiens professionnels (évaluer le parcours du salarié) et le CPF (compte personnel de formation). Il s’agit de financer des formations qualifiantes correspondant aux besoins de l’économie prévisibles à court ou moyen terme

 

Il sera nécessaire de faire le point au bout de 6 ans sur les obligations de former tous les salariés au moins une fois, et les faire bénéficier d’une progression professionnelle et/ou acquérir une certification (sinon l’employeur devra abonder le CPF)

 

C) Enfin des nouveaux comportements au travail invitent à considérer deux aspects de l’éthique du pouvoir de direction.

 

L’évaluation du travail

 

La prévention des risques professionnels

 

Evaluer le travail suppose de s’intéresser à deux axes :

 

– les emplois (on parle parfois de la « cotation » des postes)

 

– la « valeur » de la contribution de tel salarié (comportements effectifs, participation à une équipe, atteinte d’objectifs, respect de l’éthique demandée)

 

La jurisprudence récente tend à permettre à l’employeur d’évaluer des comportements spécifiques (clairvoyance, imagination…), sous réserve qu’il ait précisé ce que cela signifie, et qu’il y ait un lien direct avec l’exercice des fonctions confiées (en mentionnant des exemples concrets). Il n’est pas possible d’évaluer le respect de « valeurs » non justifiées par le contexte et le poste.

 

D’ailleurs il faut consulter le CHSCT si le dispositif d’évaluation est potentiellement porteur de stress (Cass. soc. 28 novembre 2007 n° 06-21.964)

 

Pour la prévention des risques professionnels, il appartient à l’employeur de supprimer ou réduire les risques et de protéger la santé physique et mentale des salariés. Cela suppose une estimation des risques, dont les résultats sont consignés dans un « document unique ».

 

Cela concerne aussi le stress, le harcèlement (organisation « toxique » au plan psychologique), ou encore l’équilibre vie privée vie professionnelle

 

En fait les rapports entre éthique et management sont pour une grande partie considérés par le droit social Français, surtout dans la mesure où il vise à protéger les salariés.

 

Franck MAES            /                Christine MARTIN

 

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