Source : Cass. Com. 05/11/2013 pourvoi n°12-20.263 n°1052 P + B
Comme nous le relevons souvent sur VIVALDI CHRONOS, le contentieux de la vérification du passif est une source intarissable de jurisprudence.
L’Arrêt commenté est une nouvelle preuve de l’inventivité des plaideurs intervenant pour les débiteurs, pour tenter d’obtenir le rejet des créances déclarées.
En l’espèce, un crédit bailleur avait déclaré, au passif de son débiteur bénéficiant d’un redressement judiciaire, outre sa créance au titre des loyers échus et à échoir, un poste de créance à titre conservatoire relatif à l’indemnité de résiliation.
En effet, s’agissant d’une procédure de redressement judiciaire, le contrat n’avait pas fait l’objet de ladite résiliation, mais le créancier avait estimé prudent de déclarer d’ores et déjà la créance correspondante, à échoir.
L’administrateur judiciaire met finalment fin au contrat neuf mois après l’ouverture de la procédure.
En théorie, et conformément aux dispositions de l’article R622-21 du Code de Commerce, le créancier disposait alors du délai d’un mois pour déclarer sa créance d’indemnité.
Toutefois, l’ayant déjà déclarée à titre conservatoire, le crédit bailleur se contente d’adresser, six mois plus tard, un courrier indiquant que la somme lui restant due se limitait au montant de l’indemnité de résiliation.
La créance correspondante est admise par le Juge Commissaire, décision confirmée en appel.
Le débiteur et ses liquidateurs se pourvoient en cassation.
L’argumentation soutenue est la suivante : l’indemnité de résiliation ne pouvait être déclarée à titre conservatoire, mais à l’inverse aurait dû être déclarée dans le délai du mois prévu par l’article R622-21, à compter de la notification par l’administrateur de la résiliation.
La Cour de Cassation rejette le pourvoi, considérant que le crédit bailleur a valablement déclaré sa créance à titre conservatoire et qu’il n’avait pas à la re-déclarer dans le délai du mois de l’article R622-21.
Dit autrement, le créancier peut valablement déclarer sa créance avant que le délai du mois n’ait commencé à courir.
Il s’agit là d’une décision opportune, dans la mesure où une décision contraire aurait conduit à sanctionner la diligence du créancier, qui déclare avant même que le délai lui étant ouvert n’ait commencé à courir.
C’est une décision dans la droite ligne d’autres solutions posées par la Cour de Cassation, déjà commentée sur notre site, et très favorable aux créanciers.
La Cour avait par exemple confirmé que le créancier inscrit bénéficiait de son délai propre de deux mois à compter de l’avertissement personnel qui lui est adressé par le mandataire judiciaire, mais également du délai de droit commun de deux mois à compter de la publication au BODACC, si ce second délai expire postérieurement au premier[1].
Etienne CHARBONNEL
Vivaldi-Avocats
[1] Cass. Com. 18/06/2013 pourvoi n°12-20.615 et notre commentaire du 22 aout 2013