Convention de forfait en jours : nouvelles précisions de la Chambre Sociale.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 05 octobre 2017 n° 16-23.106 (FS-P+B).

 

La Cour de Cassation vient d’apporter de nouvelles précisions sur la validité d’une convention de forfait en jours dans une espèce où 6 salariés engagés en qualité de consultants statut cadre par une entreprise de conseils en ressources humaines et management, appliquant la convention collective Syntec, appliquait une convention de forfait annuel de 217 jours, passée ensuite à 215 jours en application d’un accord collectif d’entreprise.

 

Ces 6 salariés ont saisi la Juridiction Prud’homale contestant la validité de la convention individuelle de forfait en jours qui leur était appliqué depuis leur embauche et demandant notamment le paiement d’un rappel au titre des heures supplémentaires.

 

En cause d’appel, cette affaire arrive par-devant la Cour d’Appel de PARIS, laquelle va rendre 6 Arrêts le 30 juin 2016, considérant que la convention de forfait jours est inopposable aux salariés concernés et faire droit à leur demande de paiement d’un rappel d’heures supplémentaires et de congés payés y afférents, aux motifs que l’accord collectif en cause ne prévoit aucune disposition relative aux conditions de contrôle de son application, ainsi que des modalités de suivi de l’organisation du temps de travail des salariés concernés, de l’amplitude de leurs journées d’activité et de la charge de travail qui en résulte, de sorte qu’il n’est pas conforme aux dispositions de l’article L.212-15-3 du Code du Travail.

 

La Cour d’Appel relève en outre que le système de gestion du temps de travail mis en place par l’employeur, qui sert uniquement à la facturation des clients et n’a pas pour objet le décompte du temps de travail des salariés, de sorte que l’application qui est faite de l’accord collectif en cause ne permet pas la mesure du temps de travail effectif des salariés de l’entreprise et que ce dispositif n’est pas non plus conforme aux dispositions légales, étant constaté qu’en outre l’employeur ne produit aucun élément sur l’entretien individuel mis à sa charge.

 

Ensuite de cette décision, l’employeur forme un pourvoi en Cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, il reproche à l’Arrêt d’appel d’avoir considéré la convention de forfait en jours inopposable aux salariés concernés, alors que :

 

– la convention prévoit les modalités de suivi et de l’organisation de travail des cadres, de l’amplitude de leurs journées travaillées et de la charge de travail qui en résulte,

 

– la convention détermine les modalités d’application des repos quotidiens et hebdomadaires, ceci notamment au travers de l’application d’un système de mesure du contrôle du nombre de jours travaillés par saisie du salarié, chaque semaine, du temps de travail effectué,

 

– ce qui garantit que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition dans le temps du travail.

 

Mais la Chambre Sociale ne va pas suivre l’employeur dans son argumentation.

 

Enonçant que toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect d’une durée raisonnable de travail, ainsi que des repos journaliers hebdomadaires,

 

Et relevant que les dispositions de l’accord d’entreprise se bornent à prévoir que chaque salarié saisira son temps de travail hebdomadaire dans le système de gestion des temps appelé GESTAFF, qu’un état récapitulatif du temps de travail par personne sera établi chaque mois pour le mois M-2 et remis à sa hiérarchie, qu’une présentation sera faite chaque année au comité de suivi de cet accord, que le repos entre deux journées de travail est au minimum de 11 heures consécutives et que le salarié bénéficiera, au minimum, d’une journée de repos par semaine,

 

La Cour d’Appel en a exactement déduit que, faute de prévoir un suivi régulier et effectif par la hiérarchie des états récapitulatifs qui lui sont transmis, permettant à l’employeur de remédier, en temps utile, à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, ces dispositions ne sont pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et n’assurent pas une bonne répartition, dans le temps, du travail des intéressés, et sont, par voie de conséquence, inopposable aux salariés.

 

Par suite, la Chambre Sociale rejette les six pourvois.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

 

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