SOURCE : Cass.com., 04 décembre 2012 n°11-27.454 Arrêt n°1221 F-P+B
Dans cette espèce, les deux associés d’une SARL s’étaient portés caution solidaire auprès d’établissements financiers pour deux contrats de financement, un prêt d’équipement ainsi qu’un crédit bail.
Par deux actes établis par leur Expert comptable, ils ont cédé leurs parts sociales au prix symbolique total d’un €uro.
Puis, 6 mois plus tard, le Tribunal de Commerce prononçait la liquidation judiciaire de la SARL et c’est ainsi que les banques, ayant consenti les deux crédits à cette société, se prévalaient auprès des deux anciens associés de leurs engagements de caution.
Par suite, les deux anciens associés reprochant à leur Expert comptable de ne pas s’être assuré, avant la cession, de la mainlevée de leurs engagements de caution, ils l’ont assigné afin de voir engager sa responsabilité.
Il furent toutefois déboutés tout d’abord par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX puis par la Cour d’Appel de BORDEAUX dans un Arrêt du 29 août 2012.
A l’appui de leurs décisions, les Juges du fond retenaient qu’en l’absence de lettre de mission ou de note d’honoraires définissant l’étendue de l’engagement d’Expert comptable, il n’apparaissait pas qu’il ait reçu la mission de procéder au transfert des cautionnements aux cessionnaires des parts sociales, et que, par suite, il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir effectué, voire conseillé, de réaliser ces formalités qui découlaient des actes de cession, étant précisé qu’il n’était pas démontré qu’il ait eu une connaissance de l’existence précise de ces garanties.
Les Juges du fond retenaient également que les cédants, porteurs de parts et gérants de la société qu’ils cautionnaient, étaient des personnes avisées des affaires puisqu’ils étaient gérants ou associés d’autres entreprises ayant le même objet.
Ensuite de cette décision, les deux anciens associés se pourvurent en cassation.
Bien leur en prit puisque la Haute Cour, au visa de l’article 1147 du Code Civil et de l’article 22 de l’Ordonnance du 19 septembre 1945 modifiée règlementant la profession d’Expert comptable, rappelant l’obligation de conseil qui pèse sur le rédacteur d’un acte de cession de droits sociaux pour le compte d’autrui, casse et annule l’Arrêt de la Cour d’Appel estimant qu’il appartenait, au contraire, à l’Expert-comptable rédacteur des actes de cession d’informer les cédants de la persistance de leurs engagements de caution, peu important leur qualité de dirigeant ou d’associé au sein d’autres sociétés.
L’Arrêt de la haute Cour retient également que le préjudice subi par les cédants pouvait être constitué de la simple perte d’une chance d’obtenir la mainlevée des cautionnements lors de la cession de parts.
Plus que jamais, la prudence s’impose aux Expert-comptable qui rédigent des actes juridiques dans le cadre de leur mission accessoire à la comptabilité, la même vigilance est d’ailleurs requise de tout rédacteur d’actes juridiques pour le compte d’autrui.
Christine MARTIN
Associée
Vivaldi-Avocats