Requalification du CDD en CDI : point de départ du délai de prescription de 2 ans de l’action en requalification.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 03 mai 2018, n° 16-26.437 (FS-P+B).

 

Un salarié a été engagé le 12 juillet 2004 par une étude notariale dont son père était associé, dans le cadre d’un CDD ayant son terme fixé au 31 juillet 2004.

 

Après avoir achevé ses études, le salarié a exercé divers emplois de 2007 à 2009, puis il a été à nouveau engagé par l’Etude Notariale dont son père était, entre temps, devenu, associé unique, par divers CDD, en qualité de négociateur pour les périodes suivantes :

 

– 12 janvier au 10 mars 2010,

– 03 janvier au 30 septembre 2011,

– 17 octobre 2011 au 17 juillet 2012,

– 18 juillet 2012 au 15 janvier 2013,

– Et 15 janvier 2013 au 15 janvier 2014.

 

Alors que son père était décédé le 24 décembre 2012 et que l’Etude Notariale avait été reprise par un autre titulaire, le salarié a saisi le Conseil des Prud’hommes de diverses demandes à l’encontre de l’Etude et notamment d’une demande en requalification du contrat conclu le 12 juillet 2004 en un contrat à durée indéterminée à temps plein de responsable d’un service de négociation et expert en évaluation immobilière.

 

L’Etude Notariale a été placée sous le régime de la liquidation judiciaire le 28 janvier 2014.

 

Par Jugement du 11 septembre 2015, le Conseil des Prud’hommes a prononcé la requalification du contrat à durée déterminée en date du 10 janvier 2010.

 

En cause d’appel, cette affaire arrive par-devant la Cour d’Appel de POITIERS, laquelle dans un Arrêt du 28 septembre 2016, va adopter la position des Premiers Juges, à savoir que la date du point de départ de la prescription de la demande tendant à obtenir la requalification du contrat de travail se situe à la date de conclusion de ce contrat et non au terme du dernier CDD, soit en l’espèce le 12 juillet 2004.

 

La Cour estime, en conséquence, que le délai de prescription de l’action a expiré le 19 juin 2013 en application de l’article 26 – II de la loi du 17 juin 2008 entrée en vigueur le 19 juin 2008. Par conséquent, l’action engagée par le salarié par saisine du 28 mars 2014 était donc prescrite comme tardive.

 

Il en est de même en conséquence et pour les mêmes raisons, des demandes de rappel de salaire portant sur le mois de juillet 2004 et portant sur les périodes du 1er avril au 31 décembre 2009.

 

La Cour confirme donc la décision des Premiers Juges en ce que les CDD conclus à compter du 12 janvier 2010 peuvent requalifier dans la mesure où ils ne précisent pas le motif du recours à ce type de contrat, de sorte que la Cour confirme la décision des Premiers Juges sur ce point.

 

Ensuite de cette décision, le salarié forme un pourvoi en Cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, le salarié prétend que le délai de prescription prévu à l’article 2224 du Code Civil dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008, ne court qu’à compter du terme du dernier contrat de travail à durée déterminée.

 

Mais la Chambre Sociale ne va pas suivre le salarié dans son argumentation.

 

Soulignant qu’aux termes de l’article L.1471-1 du Code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par 2 ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit, il en résulte que le délai de prescription d’une action en requalification d’un CDD en CDI, fondée sur l’absence d’une mention au contrat susceptible d’entraîner sa requalification court à compter de la conclusion de ce contrat.

 

En conséquence, le salarié qui fondait sa demande en requalification du CDD conclu le 12 juillet 2004 sur le défaut d’indication dans le contrat du motif du recours à ce type de contrat, c’est à bon droit que l’Arrêt d’appel en a déduit que la prescription de cette demande courait à compter de la date de conclusion du contrat et a donc légalement justifié sa décision.

 

Par suite, la Haute Cour rejette le pourvoi.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

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