SOURCE : Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 08 novembre 2017, n° 16-18.499 (FS-P+B).
Une salariée avait été engagée en qualité de déléguée pharmaceutique par une société ayant pour activité la promotion et la commercialisation en France de médicaments et produits de santé.
Avec plusieurs de ses collègues, itinérants comme elle, elle va saisir le Conseil des Prud’hommes de PARIS d’une demande d’indemnisation au titre de l’occupation d’une partie de son logement personnel à des fins professionnelles.
Sa demande va être accueillie favorablement par les Premiers Juges, lesquels vont condamner la société à lui payer des sommes au titre d’une indemnité d’occupation de bureau à domicile.
Par suite, l’employeur interjette appel de cette décision.
En cause d’appel, cette affaire arrive par-devant la Cour d’Appel de PARIS, laquelle va confirmer la décision des Premiers Juges et fixer en outre l’indemnité mensuelle que l’employeur devra verser chaque mois à la salariée au titre de l’occupation de son domicile à des fins professionnelles.
Pour fonder sa décision, la Cour d’Appel relève que la réalité de l’exécution à domicile d’une partie non négligeable de leurs taches administratives par les salariés itinérants est reconnue par l’employeur qui met en effet à leur disposition du matériel informatique, soit un ordinateur et une imprimante notamment et une ligne téléphonique fixe dédiée à un usage exclusivement professionnel pour leur permettre de réaliser le travail administratif dont il indique qu’il fait partie intégrante de la mission des collaborateurs itinérants.
La Cour d’appel souligne également que la salariée est obligée de stocker, non seulement le matériel informatique mis à sa disposition pour la société, mais encore la documentation fournie par son employeur, stockage qu’elle effectue à son domicile dans la mesure où aucun local professionnel n’est mis à sa disposition.
Ensuite de cette décision, l’employeur forme un pourvoi en Cassation.
A l’appui de son pourvoi, l’employeur prétend que l’exécution d’une partie de ses taches à domicile correspond à un choix du salarié qui ne constitue pas une sujétion justifiant une indemnisation, d’autant que la société met à disposition des salariés itinérants les moyens technologiques (téléphone portable, ordinateur portable, imprimante, clé 3G, iPad) leur permettant d’exécuter l’intégralité de leurs taches administratives à l’extérieur de leur domicile et que les outils et documents nécessaires à l’exécution de leur travail peuvent être stockés dans leur voiture de fonction, que outre la mise à disposition de ces moyens technologiques permet aux salariés itinérants d’effectuer leurs taches administratives à l’extérieur de leur domicile et qu’en outre l’occupation du domicile du salarié à des fins professionnelles entre dans l’économie générale du contrat des métiers de la promotion médicale qui sont déjà compensées par le salaire global de l’emploi.
Mais la Chambre Sociale ne va pas suivre l’employeur dans son argumentation.
Relevant que le salarié peut prétendre à une indemnité au titre de l’occupation de son domicile à des fins professionnelles, dès lors qu’un local professionnel n’est pas effectivement mis à sa disposition, et relevant qu’ayant constaté que les personnels itinérants doivent gérer des commandes, préparer leur visite et en rendre compte, actualiser leurs informations, répondre à leurs courriels, accéder aux formations obligatoires dispensées à distance, alors même qu’ils ne disposent pas de lieu au sein de l’entreprise pour accomplir ces taches, et que si les salariés peuvent exécuter certaines tâches courantes grâce à une connexion wifi ou au moyen d’une clé 3G leur permettant de se connecter en tout lieu, l’employeur ne peut pour autant prétendre que l’exécution par les salariés de leurs taches administratives à domicile ne résulte que de leur propre choix, compte tenu de la diversité de ces taches et de la nécessité de pouvoir s’y consacrer sérieusement dans de bonnes conditions, et relevant enfin que l’occupation du logement à des fins professionnelles résultant du stockage du matériel professionnel ne varie ni en fonction du temps de travail, ni en raison de l’utilisation des heures de délégations, la Cour d’Appel a pu apprécier souverainement l’importance de la sujétion en fixant le montant de l’indemnité devant revenir au salarié.
Par suite, la Chambre Sociale rejette le pourvoi.
Christine MARTIN
Associée
Vivaldi-Avocats