Source : CE, 17 octobre 2012, n°351833.
L’Administration Fiscale bénéficie, en matière d’impôt sur les sociétés, d’un délai de reprise courant jusqu’à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due, c’est-à-dire que la rectification envisagée par l’Administration Fiscale doit être envoyée avant le 31 décembre de la dernière année du délai de reprise.
Le fait que le contribuable reçoive le courrier à la rectification ou ait connaissance de la rectification l’année suivante est indifférente.
Dans tous les cas l’administration fiscale doit apporter la preuve de l’envoi de sa rectification avant l’expiration du délai, c’est-à-dire avant le 31 décembre.
Pour ce faire, l’Administration Fiscale peut envoyer un courrier recommandé ou faire notifier le redressement par huissier de justice.
En l’espèce, c’est cette dernière solution qui a été retenue.
Le Code de Procédure Civile prévoit les modalités de signification d’actes par un huissier.
Ces règles sont reprises en cas de Conseil d’Etat.
L’article 653 du Code de Procédure Civile, dans sa rédaction applicable au moment des faits, dispose que la date de signification d’un acte d’huissier de justice est celle du jour où elle est faite à personne, à domicile, à résidence ou à parquet.
Dans l’idéal, la signification doit être faite à personne.
Lorsque c’est une personne morale qui est concernée, l’acte est délivré à son représentant légal ou à un fondé de pouvoir ou toute autre personne habilitée à cet effet.
Lorsque la signification à personne n’est pas possible, la signification est réputée faite à domicile lorsque l’huissier de justice a vérifié que le destinataire demeure bien à l’adresse à laquelle il s’est rendu.
Dans ce cas, l’huissier de justice est tenu de remettre copie de l’acte en Marie le jour même ou au plus tard le 1er jour où les services de la Mairie sont ouverts au public. Le Maire fait alors mention sur un répertoire de la remise et lui en donne récépissé. L’huissier de justice laisse ensuite au domicile ou à la résidence du destinataire un avis de passage et cet avis mentionne que la copie de l’acte doit être retirée au plus vite à la Mairie.
En l’espèce, l’huissier de justice mandaté par l’Administration Fiscale a voulu délivrer la proposition de rectification au siège social du contribuable.
La signification à personne n’a pu avoir lieu alors que l’huissier était à la bonne adresse. Il a donc suivi la procédure de signification à domicile et a déposé l’acte à la Mairie.
Le problème dans cette affaire porte sur la date de la signification sur l’acte d’huissier : le 28 décembre soit 3 jours avant l’expiration du délai.
Le contribuable estime que cette signification n’a pas été faite avant le 31 décembre puisque la copie de l’acte n’a été déposée à la Mairie que le 2 janvier de l’année suivante alors que le premier jour ouvrable suivant le 28 décembre était le 31 décembre, date à laquelle, selon lui, l’huissier de justice aurait dû se présenter à la Mairie.
Le contribuable soutient ainsi que la prescription du délai de reprise n’avait pas été interrompue par une notification avant le 31 décembre.
Le contribuable remet donc en cause la date de signification pour invoquer que la prescription lui est acquise et que les rectifications proposées par l’Administration ne peuvent être retenues.
Le Conseil d’Etat rejette cet argument.
Il ne s’interroge pas sur le fait de savoir si l’huissier a effectivement tardé ou non à déposer la copie de l’acte à délivrer de façon tardive à la Mairie, il se borne à constater que les actes d’huissier font foi jusqu’à l’inscription en faux et que le contribuable n’a présenté aucune demande d’inscription en faux contre l’acte de signification de l’huissier de justice.
En conséquence, l’acte de l’huissier de justice portant la date du 28 décembre ne peut être contesté et par conséquent la prescription est réputée avoir été interrompue par une signification à domicile.
Le Conseil d’Etat fait ici une interprétation in abstracto des règles de procédure.
Il estime certainement que l’intervention d’un huissier de justice qui est un Officier Ministériel est une garantie suffisante du respect des droits du contribuable.
La conclusion est que lorsque le contribuable conteste l’acte d’un huissier de justice, il ne faut pas hésiter à employer les grands moyens pour le remettre en cause.
Caroline DEVE
Vivaldi-Avocats