Terrains en friche : attention aux pouvoirs de police du Maire !

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

 

SOURCE : CE, 3ème et 8ème Chambres réunies, 26 juillet 2018, n°399746, Mentionné dans les tables du recueil Lebon

 

Pour des raisons environnementales, de salubrité et de sécurité, la loi n°95-101 du 2 février 1995, codifiée à l’article L 2213-25 du code général des collectivités territoriales, permet au Maire de mettre en demeure un propriétaire de terrain privé « non bâti situé à l’intérieur d’une zone d’habitation ou à une distance maximum de 50 mètres des habitations, dépendances, chantiers, ateliers ou usines », de l’entretenir, puis de lui notifier par arrêté l’obligation d’exécuter, à ses frais, les travaux de remise en état de ce terrain.

 

A défaut pour le propriétaire d’y déférer dans les délais impartis, l’article précité permet à l’élu de « faire procéder d’office à leur exécution aux frais du propriétaire ou de ses ayants droit. »

 

La disposition fait toutefois couler peu d’encre en jurisprudence, les municipalités redoutant les quelques imprécisions du texte, liées à l’absence de décret d’application, malgré son ancienneté. La difficulté pour le législateur de définir certaines notions de la disposition comme « terrain non bâti » ou « motifs d’environnement » serait d’ailleurs à l’origine de la carence déplorée[1], qui a finalement été (en partie) couverte par un arrêt du Conseil d’Etat[2] :

 

« (…) l’application de l’article L2213-25 du cgct n’est pas rendue impossible par l’absence du décret prévu en son dernier alinéa (…) »

 

Qui confirme sa position dans un arrêt du 26 juillet 2018.

 

Dans cette affaire qui, au contraire de l’arrêt de 2007 précité dans lequel l’inertie d’un édile était en cause, le maire d’une commune avait fait usage de ses pouvoirs de police pour contraindre un propriétaire à débroussailler son terrain. A défaut d’y procéder dans les délais impartis, la commune intervenait, et refacturait la prestation au propriétaire qui saisira la juridiction administrative de la difficulté.

 

Le Tribunal administratif de Montpellier rejette la demande, mais pas la Cour administrative d’appel de MARSEILLES qui, pour décharger le propriétaire de l’obligation de payer les frais de débroussaillage, relève simplement que le terrain n’est pas situé dans une zone résidentielle.

 

Pour le Conseil d’Etat, censurant la décision entreprise, la Cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en s’abstenant de rechercher si la parcelle litigieuse « n’était pas située à une distance maximum de 50 mètres d’habitations, dépendances, chantiers, ateliers ou usines ».

 

L’affaire est ainsi renvoyée devant la Cour administrative d’appel de MARSEILLES, sans que le praticien n’obtienne des réponses à ses interrogations concernant la notion de « terrain non bâti », sauf peut-être à constater que le Conseil d’Etat relève que la parcelle était « dépourvue de toute construction », ce qui exclurait de fait, du dispositif, les jardins.

 

A suivre

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats



[1] Cf Question écrite n°18457 de Monsieur Philippe NOGRIX du 30 juin 2005, et réponse du Ministère de l’écologie et du développement durable du 3/11/2005.

[2] CE, 11 mai 2007, n°284681

 

 

 

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