Sort de la caution en cas de cession du bail avec garantie du cédant

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

 

SOURCE : 1ère civ, 16 octobre 2013, n°12-15904 12-20854 12-25772, Inédit

 

Dans le cadre de la conclusion d’un bail commercial, deux personnes se portent caution du preneur « pour l’exécution de l’ensemble des engagements pris par celui-ci aux termes du bail en ce inclus le paiement des loyers, charges, taxes, impôts, indemnité d’occupation et d’une manière générale de toutes sommes dues en raison de la jouissance des lieux loués. »

 

Le bail est cédé et le preneur demeure garant solidaire du cessionnaire pour le paiement des loyers et charges.

 

Reprochant à son nouveau preneur le non paiement des loyers et charges, le Bailleur délivre un commandement de payer au cessionnaire, au cédant, ainsi qu’à la caution du cédant, laquelle a dénié toute obligation postérieure à la cession.

 

La Cour d’appel de Paris lui donne raison, relevant que l’engagement de caution concernait expressément « toutes sommes dues en raison de la jouissance des lieux loués » du Preneur, et auquel la cession avait mis fin.

 

Sans surprise, la Cour de cassation rejette le pourvoi à l’encontre de l’arrêt.

 

Si sa décision est conforme à une interprétation stricte des termes de l’engagement de caution, troublante est la motivation de l’arrêt de la Haute juridiction, qui ne se contente pas de préciser que la Cour d’appel a, à bon droit, « relevé que l’engagement de caution litigieux concernait les sommes dues en raison de la jouissance des lieux loués », mais ajoute « qu’il ne résultait pas expressément de ses termes que les cautions avaient entendu garantir l’engagement personnel et solidaire [du preneur] envers tout cessionnaire du droit au bail ».

 

Faut-il en déduire qu’à défaut de mention expresse dans l’engagement de caution, relative à un maintien de la caution au-delà de la cession, la caution prend fin ?

 

Une telle conséquence, constituant un revirement de jurisprudence[1] s’expliquerait par le souci de la Haute juridiction de cantonner les engagements de caution à la situation locative à l’occasion de laquelle s’engage la caution : Nous nous rappellerons à cet effet que la personne cautionnant les engagements d’un preneur à bail dérogatoire n’est pas nécessairement tenu des engagements du preneur dans le cadre du bail commercial découlant du maintien dans les lieux de ce preneur[2].

 

En attendant un arrêt confirmatif, la prudence invitera les rédacteurs à indiquer dans leurs engagements de caution que la personne sera tenue de l’ensemble des engagements et obligations du preneur au titre du bail, y compris en sa qualité de cédant du droit au bail.

 

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats


 

[1] Dans le sens du maintien de la caution au-delà de la cession, cf 3ème civ, 11 mai 1995, n°93-11410, Publié au Bulletin : « Mais attendu qu’ayant souverainement retenu, sans dénaturation, qu’aux termes du bail, M. Michel X… restait débiteur solidaire, en cas de cession de ce bail, du paiement du loyer pendant la durée du contrat, que M. Rolland X…, son père, s’était engagé à payer le loyer et les charges, à défaut par son fils de remplir les engagements pris par lui, et que l’acte de cession n’avait pas élargi la portée de l’engagement de la caution solidaire, la cour d’appel en a justement déduit que M. X… était solidairement tenu au paiement des loyers arriérés avec son fils »

[2] Cf 3ème civ, 23 mai 2013, n°11-17071, Publié au Bulletin, et notre article chronos

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