Retrait du permis de conduire d’un salarié commercial.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 09 novembre 2017, n° 16-14.407 (F-D).

 

Un salarié, qui avait été embauché en qualité de commercial le 09 juillet 2007, s’est vu notifier son licenciement par un courrier du 19 novembre 2012 au motif que la privation de son permis de conduire par le jeu d’une décision de justice espagnole du 02 septembre 2012 ordonnant sa suspension pendant une durée de 8 mois, avait une incidence sur son activité professionnelle, le plaçant dans l’impossibilité d’exercer ses missions, cet élément étant indispensable à la réalisation de sa prestation de travail et confrontait l’employeur à des difficultés l’obligeant à revoir l’organisation des équipes commerciales pour pallier à son absence, d’autant que l’infraction d’alcoolémie au volant, ayant donné lieu à cette suspension, avait été commise avec un véhicule portant la marque de l’entreprise, ce comportement étant de nature à mettre en cause l’image de la société.

 

Contestant le licenciement prononcé, le salarié a saisi le Conseil des Prud’hommes de MARSEILLE aux fins de voir son employeur condamné à lui payer diverses indemnités.

 

Les Premiers Juges l’ayant débouté de l’ensemble de ses prétentions, le salarié porte l’affaire en appel et c’est ainsi qu’elle arrive par-devant la Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE, laquelle par un Arrêt du 29 janvier 2016, va confirmer le Jugement entrepris et débouter le salarié de l’ensemble de ses demandes d’indemnisation, relevant :

 

– qu’il ressort clairement du contrat de travail du salarié que ses fonctions l’obligeaient à effectuer des déplacements rendant l’usage d’un véhicule indispensable à l’exercice de son activité

 

– qu’il était expressément indiqué, dans le contrat, que le fait d’être titulaire d’un permis de conduire non suspendu, était un élément indispensable de l’accomplissement des activités confiées

 

– que, quand bien même la décision de suspension du permis de conduire prise par une autorité espagnole, le principe de réciprocité et de reconnaissance mutuelle posé par la directive 91/439 du Conseil de l’Union Européenne du 22 juillet 1991 relative au permis de conduire, s’applique à la validité des permis de conduire, mais également à l’autorité attachée aux Jugements et décisions administratives des pays membres de l’Union Européenne,

 

– et que par application de ce principe, la suspension d’un permis de conduire dans un des pays de l’Union Européenne entraîne nécessairement l’interdiction de conduire sur le territoire national tant que l’intéressé ne justifie pas avoir respecté la règlementation du pays concerné en matière de suspension, ce qui ne saurait résulter de la fourniture d’une information quant au solde de points restant sur le permis de conduire ou le suivi d’un stage.

 

Par suite, la Cour d’Appel considère que le salarié n’était pas en mesure de justifier de sa capacité à conduire sur le territoire national et que cette situation rendait nécessairement l’exercice de son activité professionnelle de commercial impossible, de sorte que la mesure de rupture reposait donc sur une cause réelle et sérieuse.

 

Ensuite de cette décision, le salarié forme un pourvoi en Cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, le salarié reproche à l’employeur de ne pas avoir apporté la preuve qu’il était dans l’impossibilité d’exercer sa mission, nonobstant la mesure de retrait du permis de conduire, de ne pas rapporter la preuve du trouble objectif et caractérisé dans l’entreprise apporté par cette situation et de ne pas avoir répondu à son argumentation selon laquelle il était domicilié à côté du siège social de l’entreprise et que les éventuelles déplacements étaient toujours effectués à deux.

 

Mais la Chambre Sociale ne va pas suivre le salarié dans son argumentation.

 

Relevant que l’employeur produisait aux débats la pièce de procédure émanant d’une Juridiction espagnole portant mise en demeure au salarié de s’abstenir de conduire des véhicules terrestres à moteur pendant 8 mois et de remettre son permis de conduire, et que le salarié, au moment du licenciement, n’était pas en mesure de justifier de sa capacité à conduire sur le territoire national, de sorte qu’ayant relevé que cette situation rendait impossible l’exercice de son activité professionnelle pour laquelle l’usage d’un véhicule était indispensable, la Cour d’Appel a fait ressortir que le retrait du permis de conduire de l’intéressé pendant une durée de 8 mois entraînait un trouble objectif caractérisé dans le fonctionnement de l’entreprise et a décidé en conséquence que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse.

 

Par suite, la Haute Cour rejette le pourvoi.

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

 

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