Responsabilité du créancier ayant assigné en redressement judiciaire

Etienne CHARBONNEL
Etienne CHARBONNEL - Avocat associé

 

Source : Cass. 2ème Civ. 30/01/2014 pourvoi n°12-29.726 n°151 F-P+B

 

Un créancier avait, sur le fondement d’un arrêt d’appel, tenté d’obtenir paiement de sa créance. N’y parvenant pas, il assigne son débiteur en redressement judiciaire.

 

L’arrêt d’appel fondant la créance est finalement cassé par la Cour de Cassation.

 

Le débiteur estime alors que son créancier a engagé sa responsabilité en « déclenchant » sa procédure collective, et l’assigne en indemnisation de l’ensemble du préjudice lié à cette ouverture de redressement.

 

La Cour de Cassation, dans l’arrêt commenté, casse l’arrêt d’appel qui a condamné le créancier à indemniser le préjudice subi par la société injustement placée en redressement judiciaire.

 

En effet, l’arrêt censuré avait considéré que l’indemnisation d’un préjudice subi du fait de l’exécution d’une décision de justice n’était pas subordonnée à une faute du créancier. En d’autres termes, un créancier exécute une décision de justice à ses risques et périls, et engage sa responsabilité si la décision est finalement infirmée.

 

La Cour de Cassation censure la décision pour fausse application. Elle confirme en effet sa jurisprudence antérieure, en jugeant qu’une assignation en redressement judiciaire ne constitue pas un acte d’exécution de la décision de justice fondant la créance. Le créancier ne peut donc engager sa responsabilité à raison de cette assignation, sauf à ce que celle-ci constitue, de sa part, un acte d’exécution, c’est-à-dire qu’elle constitue un moyen de pression à l’encontre de son débiteur. De jurisprudence constante, la cour de cassation exige à cet effet que le créancier justifie avoir réalisé, préalablement à l’introduction de l’assignation en redressement judiciaire, des actes d’exécution infructueux.

 

L’arrêt apporte également une précision à notre connaissance inédite : il importe peu que le titre fondant la créance soit exécutoire à titre provisoire ou de plein droit. Cela signifie qu’une décision de référés, exécutoire par provision, et même frappée d’appel, pourrait fonder une demande en ouverture de procédure collective.

 

Une telle solution est finalement logique, puisque l’état de cessation des paiements est une notion de trésorerie, faisant référence au passif exigible, c’est qu’est très précisément une décision revêtue de l’exécution provisoire.

 

Etienne CHARBONNEL

Vivaldi-Avocats

 

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