Protection du commerçant par le code de la consommation

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

  

SOURCE : 1ère civ, 9 juillet 2015, n°14-17051, F-P+B

 

Une pharmacie est assignée par un agent immobilier en règlement de rémunération, à la suite de la vente d’un fonds de commerce.

 

La pharmacie excipe de la nullité du contrat de mandat de vente, reprochant à l’agent immobilier une absence de bordereau de rétraction et de respect du délai de 7 jours, alors que le contrat était conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile, conformément aux dispositions des articles L121-23 à L121-25 du Code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur avant la loi n°2014-344 du 17 mars 2014.

 

Se fondant sur les dispositions de l’article L121-22 4° « ancien » du Code de la consommation,

 

« (…) Ne sont pas soumis aux dispositions [consuméristes d’ordre public] :

 

(…) ;

 

4° Les (…) prestations de services lorsqu’elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d’une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession » ;

 

la Cour d’appel de RENNE (CA RENNES, 11 mars 2014) la déboute de ses prétentions. Elle rappelle qu’il est « de jurisprudence constante que pour un commerçant, normalement avisé de la valeur de son fonds et de l’intérêt présenté par l’opération, la vente de celui-ci est en rapport direct avec l’activité exercée dans le cadre de l’exploitation dudit fonds ».

 

L’arrêt est confirmé par la Cour de cassation :

 

« Mais attendu que l’arrêt retient à juste titre que, pour un commerçant, la vente de son fonds de commerce est en rapport direct avec son activité, de sorte que l’opération est exclue du champ d’application de l’article L. 121-22 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à la loi du n° 2014-344 du 17 mars 2014 »

 

Cet arrêt, portait sur des faits antérieurs à la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation qui en a notamment réformé les dispositions du Livre 1er, titre II chapitre 1. L’article L121-16-1 « nouveau » dispose que :

 

«  III.-Les sous-sections 2, 3, 6 et 7 [NDLR : Article L121-17 à L121-18-2 et Articles L121-21 à L121-21-8 à L121-22-1], applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l’objet de ces contrats n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq » ;

 

Ces nouvelles dispositions visent à mieux protéger les petits entrepreneurs (personnes physiques ou personnes morales de moins de 5 salariés) contre les pratiques de démarchage abusifs[1]. Elles ont vocation, à la faveur de la substitution du terme « rapport direct » par « champ d’activité principal » à protéger l’entrepreneur dans le cadre de démarchages tels que les « contrats de publicité », de « maintenance régulière », d’ « insertion dans des annuaires professionnels », de « réalisation de sites Internet », etc.

 

« En revanche, quand l’objet du contrat sera lié au champ de compétence du professionnel, il n’y aura pas de protection possible. Par exemple, un boulanger qui voudra se procurer un four sera censé savoir ce qu’il achète »

 

La vente de fonds de commerce d’une pharmacienne entrerait-elle ainsi dans le champ de compétence de son activité principale ? Le débat reste entier et la publication de l’arrêt au bulletin peut tout autant indiquer que la décision demeure d’actualité, ou que cette décision ne serait pas celle prise en application de l’article L121-16-1 « nouveau ».

 

L’interprétation de ces nouvelles dispositions est ainsi attendue

 


[1] Débats parlementaires, compte rendu de Séance du 12 septembre 2013 http://www.senat.fr/seances/s201309/s20130912/s20130912003.html

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats

 


[1] Ce queconfirme d’ailleurs l’existence d’une publication de l’arrêt au bulletin.

 

 

 

 

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