Privilège du for du consommateur dans le cadre d’une action collective

Virginie PERDRIEUX
Virginie PERDRIEUX

 

Source : CJUE, conclusions de l’Avocat Général, Monsieur Michal BOBEK, 14 novembre 2017, affaire C-498/16, MAXIMILIAN SCHREMS c/ FACEBOOK IRLANDE LIMITED

 

Un ressortissant autrichien, habitué des actions diligentées à l’encontre de la société FACEBOOK, pour avoir obtenu une décision de la CJUE ayant conduit à l’invalidation du dispositif « Safe harbor » permettant le transfert des données de l’Europe vers les Etats-Unis grâce à un mécanisme d’autocertification (CJUE, 6 octobre 2015, affaire C-362/14, MAXILIAN SCHREMS c/ DATA PROTECTION COMMISSIONER), a initié une action contre FACEBOOK IRLANDE devant cette juridiction, soutenant que la société aurait violé ses droits au respect de la vie privée et à la protection des données personnelles.

 

L’action a été non seulement intentée à titre personnel par ce ressortissant autrichien, mais également au nom de sept autres utilisateurs du site Internet Facebook, domiciliés respectivement en Allemagne, en Autriche et en Inde, qui lui avaient cédé le droit de faire valoir leurs prétentions.

 

Pour sa part, le ressortissant autrichien considère que les juridictions autrichiennes sont compétentes pour connaître de l’ensemble du litige à raison du privilège du for du consommateur. La société FACEBOOK ayant contesté la compétence internationale des juridictions autrichiennes, ces dernières ont saisi la CJUE afin de se prononcer sur la question de la compétence, se dissociant comme suit :

 

– Le ressortissant autrichien bénéficie-t-il de la qualité de consommateur dans son action à titre personnel ?

 

– Le privilège du for du consommateur peut-il s’étendre à son action au nom des autres consommateurs ?

 

Concernant la première question, l’Avocat Général, après avoir observé que le requérant était spécialisé en droit de l’informatique et en droit de la protection des données personnelles et utilisait FACEBOOK, à la fois à titre privé et pour des évènements professionnels tels que la promotion de livres ou de conférences, retient que l’exercice d’activités telles que la publication de livres, la tenue de conférences, l’exploitation de sites Internet ou la collecte de dons n’implique pas qu’un consommateur perde cette qualité lorsqu’il souhaite faire valoir ses droits concernant son propre compte FACEBOOK utilisé à des fins privées.

 

Ainsi, le requérant peut être considéré comme un consommateur s’agissant de ses demandes faites à titre personnel.

 

Concernant la seconde question, il convient de rappeler que le privilège du for du consommateur lui permet d’intenter une action contre son partenaire contractuel étranger devant les Tribunaux de son domicile.

 

L’Avocat Général considère cependant que le privilège du for ne saurait s’étendre à une même action menée au nom et pour le compte d’autres consommateurs domiciliés dans le même Etat membre, dans d’autres Etats membres ou dans des Etats tiers. Dès lors, seule une partie à la relation contractuelle peut se prévaloir du for spécial.

 

En effet, il apparaît qu’une telle extension pourrait emporter des dérives, puisqu’elle permettrait de choisir opportunément le lieu de la juridiction chargée de connaître du litige, en demandant artificiellement à un consommateur domicilié en ce lieu de céder ses prétentions, ce qui conduirait à terme à surcharger certaines juridictions dont les décisions seraient considérées comme plus favorables aux consommateurs.

 

Virginie PERDRIEUX

Vivaldi-Avocats

Print Friendly, PDF & Email
Partager cet article