Distribution : Piqûre de rappel : l’adhésion forcée à une association de commerçants est nulle

Laurent Turon
Laurent Turon

 

SOURCE : Cass 1ère civ 27/09/2017, n° 16-19.878, F-D

 

            I –

  

L’arrêt ne fait pas les honneurs de la publication au bulletin, puisque le principe selon lequel nul n’est tenu d’adhérer à une association ou d’en nommer un membre, sauf à ce que la loi en dispose autrement, a déjà été affirmé par la Cour de Cassation[1]. L’arrêt de l’Assemblée Plénière ayant une valeur en termes de sécurité juridique bien supérieure à la loi, dans la mesure où 6 Chambres de la Cour de Cassation réunies n’ont pas vocation à débattre à nouveau sur le sujet qui a posé en principe que :

 

– La clause du bail imposant au locataire à adhérer et à maintenir son adhésion pendant la durée du bail est entachée d’une nullité absolue[2] ;

 

– Alors que la nullité absolue impose à l’association la restitution de cotisations, sous déduction de la valeur des prestations fournies aux locataires selon une estimation laissée à l’appréciation souveraine des Juges du fond[3].

 

II –

 

Le cas d’espèce ne déroge pas à la jurisprudence précitée, c’est-à-dire un preneur à bail qui dans son contrat est obligé d’adhérer à une association et qui finalement soutient que celle-ci lui a été imposée et réclame en remboursement l’ensemble des cotisations (il y en avait pour près de 145 000 €).

 

Sans surprise, les juridictions du fond consacrent la nullité des stipulations discutées sur le fondement des principes consacrés par les articles 4 de la loi de 1901 (tous membres d’une association peut se retirer en tout temps, après paiement des cotisations échues et de l’année courante, nonobstant toute clause contraire) et de l’article 11 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme selon laquelle toute personne a droit à sa liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association.

 

L’intérêt du commentaire au-delà de la piqûre de rappel tient au fait que la Cour censure quand même la Cour d’Appel qui consacrait ce principe, pour ne pas avoir admis la responsabilité délictuelle[4] de l’association pour cette contrainte, dans la mesure que l’obligation d’adhérer résultait de la seule qualité de locataire d’un local, était en quelque sorte sans lien de causalité avec l’association.

 

La censure est prononcée au motif que l’association qui était dans l’incapacité de fournir un bulletin d’adhésion, avait méconnu la liberté fondamentale du locataire de ne pas adhérer. Ainsi, l’association qui participe à un programme de recrutement forcé des locataires et se trouve dès lors dans l’incapacité de justifier des bulletins d’adhésion volontaire à son association, peut elle souffrir non seulement de la condamnation en remboursement des cotisations appelées, mais également de dommages et intérêts venant consacrer le préjudice distinct tenant à la liberté d’association consacrée par les textes précités.

 

Eric DELFLY

VIVALDI-Avocats



[1] Cass Ass. Plén. 09/02/2001, n° 468 P

[2] Cass 3e civ 12/06/2003, n° 698 FS-PBRI

[3] Cass 3e civ 23/11/2011, n° 10-23.928

[4] Ancien art 1382 du Code Civil désormais art 1240

 

 

 

 

 

 

 

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