Ordonnances travail : ce qui change en matière de motivation du licenciement.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 (article 4)

 

L’Ordonnance travail a adopté une mesure principalement destinée aux petites et très petites entreprises, afin de les aider à sécuriser l’énoncé du motif de licenciement et de prévenir un défaut ou une insuffisance de motivation de nature à priver le licenciement de cause réelle et sérieuse.

 

En effet, on peut rappeler, autant que de besoin, que la Jurisprudence de la Cour de Cassation considère que la lettre de licenciement adressée au salarié fixe les limites du litige, de sorte qu’une absence de motif ou une imprécision ou encore une insuffisance de motif, prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.

 

L’article 4 de l’Ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 vient assouplir certaines obligations en matière de motivation de la lettre de licenciement.

 

Tout d’abord l’employeur pourra notifier le licenciement en utilisant un modèle type, que le licenciement soit prononcé pour un motif personnel ou pour un motif économique.

 

Ces modèles qui seront adoptés par décret en Conseil d’Etat, rappelleront les droits et obligations de chaque partie au contrat de travail. Ils devraient faire l’objet d’une concertation avec les partenaires sociaux avant leur adoption.

 

Par ailleurs, la lettre de licenciement pourra être précisée postérieurement à sa notification.

 

L’Ordonnance prévoit que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement peuvent, après sa notification être précisés par l’employeur, soit à son initiative, soit à la demande du salarié, dans les délais et conditions qui seront fixés par décret en Conseil d’Etat à paraître, que le licenciement soit prononcé pour un motif personnel ou économique.

 

Il est précisé que l’Ordonnance prévoit la possibilité de préciser le motif de licenciement et non pas, comme dans les projets initiaux, de compléter la lettre de licenciement.

 

Par suite, cette possibilité de préciser pourra compenser une éventuelle insuffisance de motivation initiale, par contre l’employeur ne pourra pas invoquer d’autres motifs que ceux déjà mentionnés dans la lettre.

 

Le décret à paraître fixera les délais et conditions dans lesquels la précision pourra être apportée.

 

L’article L.1235-2 alinéa 2 du Code du Travail précise désormais que c’est la lettre de licenciement éventuellement précisée par l’employeur qui fixera désormais les limites du litige.

 

Par suite, la Jurisprudence actuelle de la Chambre Sociale qui s’oppose à la possibilité d’invoquer des motifs qui ne seraient pas contenus dans la lettre de notification du licenciement, conserve toute sa validité.

 

Par ailleurs, selon l’article L.1235-2 alinéa 3 du Code du Travail, une imprécision du motif ne rend plus nécessairement le licenciement sans cause réelle et sérieuse, contrairement à la Jurisprudence actuelle de la Chambre Sociale.

 

En effet, le texte prévoit que désormais, à défaut pour le salarié d’avoir demandé à son employeur de préciser les motifs énoncés dans la lettre, l’irrégularité constituée par une insuffisance de motivation ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse. L’indemnité, dans un pareil cas, ne pourra pas excéder un mois de salaire.

 

Toutefois, si le salarié a demandé des précisions à son employeur, le vice de motivation prive le licenciement de cause réelle et sérieuse, le préjudice du salarié étant alors réparé par l’indemnité prévue par le barème obligatoire en application de l’article L.1235-3 du Code du Travail.

 

En outre, désormais en cas de pluralité de motifs de licenciement, si l’un des griefs reprochés au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale (dénonciation d’actes de maltraitance, accusation de harcèlement, participation à une grève, ou encore exercice du droit de retrait), alors le licenciement encourt la nullité.

 

L’article 4 de l’Ordonnance prévoit que la nullité encourue ne dispense pas le Juge d’examiner l’ensemble des griefs énoncés pour en tenir compte le cas échéant dans l’évaluation de l’indemnité à allouer au salarié, ceci conformément à l’article L.1235-2-1 du Code du Travail.

 

Toutefois, même si le Juge considère que les autres griefs contenus dans la lettre de licenciement auraient pu constituer une cause réelle et sérieuse de rupture, l’indemnité ne pourra pas être inférieure à 6 mois de salaires, en application de l’article L.1235-3-1 du Code du Travail.

 

Il est précisé que les dispositions relatives aux modèles types de licenciement, à la possibilité de préciser les motifs et à l’insuffisance de motivation, dont l’entrée en vigueur est subordonnée à la publication de décrets d’application, seront applicables à la date de cette publication et au plus le 1er janvier 2018.

 

La règle sur la pluralité de motifs de licenciement est applicable depuis le 24 septembre 2017.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

 

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