Obligation de confidentialité du mandataire ad hoc

Etienne CHARBONNEL
Etienne CHARBONNEL - Avocat associé

 

 

Source : Cass. Com. 22 septembre 2015, Pourvoi n°14-17.377 F-P+B

 

Le livre VI du Code de Commerce se divise en deux phases de traitement des difficultés des entreprises :

 

       Une phase amont, non judiciaire, de recherches de solutions négociées ;

 

       Une phase aval, judiciaire, de recherche de solutions imposées.

 

Très clairement, l’argument de la confidentialité est absolument essentiel pour tous les débiteurs et créanciers entrant en négociation aux cours de procédures prévoyant expressément cette confidentialité, que sont le mandat ad hoc et la conciliation.

 

Mais dans le cadre de ces procédures, la jurisprudence rappelle régulièrement que l’accord, s’il est trouvé, est contractuel, non imposé par les juridictions. Seule la levée de la confidentialité, sous la forme d’une homologation d’un accord de conciliation permet de lui donner valeur de titre exécutoire.

 

Et qui dit accord négocié dit éventuellement d’un négociateur de mauvaise foi.

 

Tel était le cas d’une banque, s’il faut en croire la thèse d’une société débitrice, qui avait demandé au tribunal à pouvoir bénéficier d’une procédure de mandat ad hoc, dans laquelle le mandataire (un administrateur judiciaire) avait eu mission de négocier des délais de paiement.

 

La négociation n’a manifestement pas abouti, et la débitrice a été contrainte de solliciter l’ouverture d’un redressement, très vite converti en liquidation.

 

En suite de cette conversion, l’établissement bancaire vient rechercher le dirigeant caution en paiement.

 

Celui-ci, pour s’y opposer, fait valoir la mauvaise foi de la banque et son comportement dans le cadre de la négociation, qu’elle n’aurait à aucun moment cherché à voir aboutir. En témoigne une attestation produite par cette caution, émanant du mandataire ad hoc lui-même, qui précisait que la banque avait fait échouer les négociations là où l’ensemble des autres créanciers étaient prêts à y donner une suite favorable. Que ce faisant, l’établissement bancaire avait précipité la déconfiture de la société.

 

La Cour d’Appel avait écarté cette attestation des débats, rappelant l’obligation de confidentialité à laquelle est tenu le mandataire ad hoc dans le cadre de sa mission.

 

La Cour de Cassation confirme l’arrêt, estimant que l’obligation de confidentialité est absolue, et non prévue au bénéfice de la seule société débitrice qui ne saurait unilatéralement lever l’obligation qui pèse sur le mandataire.

 

Cette décision est un rappel bienvenu. La réussite de ce genre de procédure, et la confiance des créanciers dans les mandataires, n’est assurée, nous le rappelions en introduction, que par la certitude que les échanges resteront confidentiels.

 

A l’inverse, une confidentialité à géométrie variable sonnerait le glas de toute solution de prévention.

 

Etienne CHARBONNEL

Vivaldi-Avocats

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