Source : Cour de Cassation Chambre Sociale 1er février 2017 n° 15-24166
En l’espèce, un salarié est placé en arrêt de travail à la suite d’une altercation avec un de ses collègues, puis licencié pour inaptitude.
Il invoque la nullité de son licenciement sur le fondement du harcèlement moral commis par l’employeur et du manquement de celui-ci à son obligation de sécurité.
Il précise que l’employeur a manqué à cette obligation compte tenu des violences physiques qu’il a subies quand bien même aurait-il pris des mesures en vue de faire cesser ces agissements.
La Cour d’Appel écarte l’argumentation du salarié, les violences étant la conséquence de l’action initiale et spontanée de ce même salarié, survenue dans un contexte de tensions.
La Cour de Cassation approuve la Cour d’Appel. : les faits avaient pour cause le comportement du salarié et l’employeur ne pouvait anticiper le risque.
La jurisprudence de la Haute Cour a régulièrement évolué depuis les arrêts rendus le 28 février 2002 à propos de salariés victimes de l’amiante.
Ces arrêts dont la portée générale a été reconnue par les commentateurs, ont consacré l’existence d’une obligation de sécurité de résultat de l’employeur
La Chambre Sociale de la Cour de Cassation a jugé que l’obligation de sécurité est une obligation de résultat et qu’en conséquence, dès lors que le risque de l’atteinte à la santé ou à la sécurité du salarié est avéré, il peut être condamné à verser des dommages et intérêts pour manquement à cette obligation.
La Cour de Cassation a toutefois infléchi quelque peu sa position en 2015 dans une espèce où l’employeur avait pris toutes mesures les prévues par les articles L 4121-1 et L 4121-2 du Code du Travail pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés[1].
La Cour de Cassation s’est à nouveau prononcée en 2016 à l’occasion des faits d’espèce suivants :
Le salarié avait été victime d’une agression sur son lieu de travail par un tiers à l’entreprise.
L’employeur avait plaidé qu’il ne pouvait deviner qu’un échange verbal interviendrait et que l’agression présentait un caractère soudain et imprévisible.
La Cour de Cassation a relevé que l’employeur justifiait avoir pris les mesures de prévention qui s’imposaient et a approuvé la Cour d’Appel d’avoir déduit l’absence de manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat[2].
En matière de harcèlement moral, la Cour de Cassation considérait que lorsqu’un salarié est victime de harcèlement moral, celui-ci est en droit de faire constater un manquement à l’obligation de sécurité de résultat quand bien même l’employeur aurait-il pris des mesures en vue de faire cesser ces agissements.
Elle a assoupli quelque peu sa position notamment par un arrêt en date du 22 septembre 2016 :
La Haute Cour a admis que le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité était exclu s’il apportait la démonstration de ce qu’il avait pris des mesures de prévention, formé, informé les salariés, et qu’avisé du harcèlement moral, il a pris les mesures immédiates pour le faire cesser[3].
L’arrêt dont il s’agit ici s’inscrit dans le prolongement de ces jurisprudences.
Patricia VIANE-CAUVAIN
Vivaldi-Avocats.
[1] Cass Soc 25.11.2015 n° 14-24444
[2] Cass Soc 22.09.2016 n° 15-14.005
[3] Cass Soc 1.06.2016 n° 14-19702