SOURCE : Cass crim, 20 mai 2015, n°14-81147, F – P+B+I
S’inspirant de la class action anglo-saxonne, l’action de groupe introduite par la loi HAMON visait à assurer une meilleure protection des droits des consommateurs. Elle permet à toute association « agréée » de consommateurs de saisir les juridictions d’un litige relatif au droit de la consommation. Elle se distingue ainsi de la class action, qui permet à n’importe quel groupe d’engager n’importe quelle action, quel que soit l’intérêt en jeu[1].
Un pas de plus vers la class action vient d’être franchi par la Chambre criminelle de la Cour de cassation.
En l’espèce, des personnes physiques, condamnées pour abus de confiance par la Cour d’appel de Paris, font l’objet d’une confiscation de certaines sommes à titre de peine complémentaire.
L’Association française d’épargne et de retraite (AFER), mandatée par 55114 adhérents, a saisi la Cour d’une requête fondée sur les dispositions de l’article 710 du CPP, en restitution des 25 millions d’euros environ ainsi saisis. Elle en sera déboutée par la Cour d’appel de Paris, qui considère qu’une telle requête s’apparente à une « class action », irrecevable en vertu du principe général du droit « nul ne plaide par procureur ».
L’arrêt est attaqué devant la Cour de cassation pour violation des dispositions de l’article 1984 du Code civil régissant le mandat, l’AFER considérant que, en justifiant d’un mandat exprès, individuel, spécial et exclusif de ses adhérents, agissant pour leur compte, elle pouvait introduire une telle requête collective. A juste titre, pour la Haute juridiction :
« Vu les articles 1984 du code civil, et 710 du code de procédure pénale ;
Attendu qu’aucun texte n’interdit de donner mandat à un tiers de présenter une requête en restitution dès lors que l’existence de ce mandat est prouvée et que le nom du mandant figure dans chaque acte de procédure effectué par le mandataire ; (…)
Attendu que, pour déclarer cette requête irrecevable, la cour d’appel énonce que nul ne plaide par procureur et que, même si l’AFER a reçu mandat de représenter chacun de ses adhérents, elle entend exercer, en leur lieu et place, leur droit à demander la restitution de sommes placées sous main de justice, cette demande s’apparentant à une ” class action ” ;
Mais attendu qu’en statuant ainsi, alors qu’elle constatait l’existence d’un mandat individuel d’agir en restitution, donné à l’association par chacun des adhérents nommément désigné, la cour d’appel a méconnu les textes et principe ci-dessus rappelés ; »
Est-ce à dire que tout groupement pourra introduire toute action sous réserve d’être dûment mandaté, sauf si un texte interdit le mandat ? L’avenir nous le dira.
Sylvain VERBRUGGHE
Vivaldi-Avocats
[1] Sur l’action de groupe, cf articles chronos « Loi Hamon : Introduction de l’action de groupe en droit français » du 16 avril 2014 et « L’action de groupe en droit français : le décret d’application est entrée en vigueur le 1er octobre… » du 2 octobre 2014