La signification de l’assignation en opposition à commandement de payer n’a pas à être faite au domicile du représentant légal du bailleur

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

 

 

SOURCE : 2ème civ, 19 février 2015, n°13-28.140, Publié au bulletin

 

Abondant est le contentieux de la signification à personne de l’article 654 du Code de procédure civil, et plus particulièrement des diligences nécessaires à l’établissement du procès-verbal de recherches infructueuses de l’article 659.

 

Le domaine des baux commerciaux n’y échappe pas : Un preneur à bail, destinataire d’un commandement de payer, avait assigné son bailleur devant le juge des référés et obtenu la suspension des effets de la clause résolutoire et le séquestre des sommes visées au commandement.

 

Le bailleur interjette appel, en soulevant la nullité de l’acte introductif d’instance, délivré suivant les modalités de l’article 659 du CPC. Plus précisément, l’huissier avait vainement tenté de délivrer l’assignation à l’adresse de la personne morale, sans s’intéresser au domicile de son gérant, pourtant stipulé au bail. Le bailleur en conclut que l’acte devant être remis à personne (art 654), et qu’une SCI est représentée par son gérant, l’huissier aurait dû signifier l’acte au domicile du gérant.

 

Si cette position était contraire à la jurisprudence classique de la Cour de cassation[1], selon laquelle l’huissier de justice n’a d’obligation de tenter une signification qu’au siège social de la personne morale, sans se préoccuper du domicile de ses dirigeants sociaux, elle pouvait se conformer au conclusif d’un arrêt publié au bulletin, récemment rendu par la Haute juridiction[2], selon lequel :

 

« L’huissier de justice, qui avait précisé dans le procès-verbal de recherches infructueuses que la société n’avait plus d’activité et de lieu d’établissement, ne pouvait se borner à mentionner l’identité et le domicile de son représentant sans autre diligence en vue de lui signifier l’acte »

 

Fallait-il donc en déduire que lorsque l’huissier ne connait pas le domicile du gérant, il n’a pas à la rechercher, mais dans le cas contraire, cette diligence lui incombe ?

 

La position qu’à semblé adopter la Cour d’appel de Bordeaux, qui prononce ainsi la nullité de l’assignation et de l’ordonnance querellée, en retenant que la signification doit être réalisé « à une personne se déclarant habilitée (…) et que la société Mirsud a omis de porter l’adresse du gérant à la connaissance de l’huissier de justice qui, s’il l’avait connue, n’aurait pas manqué de signifier l’acte à son domicile »

 

L’arrêt est cassé par la Cour de cassation, sur le fondement de l’article 690 du CPC :

 

« Qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses propres constatations que l’adresse à laquelle l’huissier de justice avait effectué la signification était celle du siège social, la cour d’appel, en retenant pour l’annuler que l’acte aurait dû être signifié à l’adresse personnelle du gérant, a violé [l’article 690 du Code civil] » ;

 

Il résulte donc de ces deux arrêts publiés que l’officier ministériel n’a pas à rechercher l’adresse du représentant légal de la personne morale avant de dresser son PV article 659, mais, s’il a connaissance de cette information, transcrite dans son acte, cette diligence lui incombe.

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats

 


[1]3ème civ, 16 mai 1990, n°88-18.931, Bull. civ. III, n°121; 2ème civ., 20 nov. 1991, n°90-14.723, Bull. civ. II, n°316; 2ème civ., 21 juin 1995, n°93-16.761, Bull. civ. II, n°192; 3ème civ, 13 mars 1996, n°94-16.173, Bull. civ. III, n°69; 2ème civ., 8 mars 2001, n°99-13.674,

[2]2ème civ., 14 oct. 2004, n°02-18.540, FS – P+B

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