La rupture de la période d’essai d’un salarié suite à l’annonce d’une grave maladie est nulle et ouvre droit à la réparation du préjudice subi mais pas à l’indemnité prévue en cas de licenciement nul pour motif discriminatoire équivalent à six mois de salaire minimum.
Si la rupture du contrat de travail est régie par des dispositions spécifiques prévues par le contrat de travail, en revanche ces dispositions ne sont pas applicables pendant la période d’essai. En effet, pendant la période d’essai, chacune des parties dispose, en principe, d’un droit de résiliation discrétionnaire sans avoir à alléguer des motifs[1].
Cette liberté de rupture attachée à la période d’essai ne doit pas être détournée de sa finalité puisqu’elle doit permettre à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d’apprécier si les fonctions occupées lui conviennent[2].
La rupture de la période d’essai par l’employeur doit avoir pour cause des considérations professionnelles et doit donc se fonder sur une appréciation des aptitudes du salarié. Ce droit de rompre la période d’essai ne doit donc pas dégénérer en abus. A ce titre, la rupture de la période d’essai n’échappe pas aux règles fondamentales du droit du travail, telles que l’illicéité des discriminations[3]. Si par exemple l’employeur a rompu la période d’essai pour l’un des motifs discriminatoires, tel que l’état de santé du salarié, alors la rupture est nulle[4]. La nullité de la rupture entraîne la possibilité pour le salarié d’être réintégré.
La question qui a été posée à la Cour de cassation était de savoir si, en cas de rupture nulle de la période d’essai, un salarié peut bénéficier de l’indemnité égale au moins à six mois de salaire applicable en matière de licenciement nul.
Dans l’arrêt du 25 juin, une salariée engagée en qualité de gestionnaire sinistre le 16 décembre 2013 a été placée en arrêt de travail pour maladie le 13 janvier 2014 jusqu’au 17 août 2014. Le 22 juin, l’employeur lui a notifié la fin de sa période d’essai à effet au 18 août 2014.
L’employeur a été condamné à verser à la salariée des dommages et intérêts au titre du préjudice résultant de la rupture abusive de la période d’essai basée sur un motif discriminatoire, à savoir l’état de santé. Cependant, le salarié a contesté la décision estimant qu’il aurait dû bénéficier de l’indemnité égale au moins aux six derniers mois de salaires due en cas de nullité de la rupture du contrat.
La Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’avoir retenu que la salariée présentait des éléments laissant supposer l’existence d’une discrimination, puis que l’employeur ne démontrait pas que sa décision de rompre la période d’essai était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, a exactement retenu que la salariée pouvait prétendre à des dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de cette rupture dont elle a souverainement fixé le montant. En revanche, la Haute juridiction écarte l’application des dispositions applicables en matière de licenciement nul, à savoir le paiement d’une indemnité au moins égale à six mois de salaires.
En définitive, le salarié ne peut pas prétendre à l’indemnité prévue en cas de licenciement nul pour motif discriminatoire.
Sources : Cass. soc., 25 juin 2025, n° 23-17.999
[1] Cass. soc., 26 juin 1986, n° 83-46.058 ; Cass. soc., 4 mars 1987, n° 83-45.842
[2] C. trav., art. L. 1221-20
[3] C. trav., art. L. 1132-1 et suivants
[4] Cass. soc., 16 févr. 2005, n° 02-43.402