SOURCE : Cass , 1ère civ., 10 septembre 2014. n° 12-28977 Arrêt n° 1020 F-P+B
Il n’est pas inutile de rappeler la nécessité pour une banque créancière, de s’informer auprès de la caution outre de ses revenus, de l’état de son patrimoine, de la valeur et de la nature des biens le composant, ainsi que de ses engagements et charges, en retenant des critères identiques à ceux qu’elle prend en considération lorsqu’elle est sollicitée pour l’octroi d’un prêt, ceci afin de veiller à ce que le cautionnement soit d’un montant compatible avec le patrimoine et les revenus de la caution au nom du principe de proportionnalité.
Ce principe avait déjà été commenté en avril 2014 par VIVALDI-CHRONOS[1] , et l’arrêt présentement étudié réitère la position de la Cour de Cassation selon laquelle, il appartient au créancier, qui a fait souscrire à la caution un engagement manifestement disproportionné à ses biens et revenus, d’établir que, en dépit de la disproportion initiale de l’engagement, la caution est en mesure d’y faire face au jour de l’appel en garantie.
En l’espèce, Mme. X s’est rendue caution solidaire d’un prêt consenti par une banque à M.Y. et destiné à financer l’achat d’un véhicule automobile.
Le débiteur étant défaillant dans son obligation de règlement, la banque a assigné M.Y et Mme X en remboursement dudit prêt.
En cause d’appel, la caution a soutenu, sur le fondement de l’article L.341-4 du code de la consommation, que la banque ne pouvait se prévaloir de son engagement de caution en raison de son caractère disproportionné à ses biens et revenus.
La cour d’appel a accueilli la demande de Mme X, et la banque a formé un pourvoi en cassation.
A l’appui de son pourvoi la banque soutient :
que l’article L.341-4 précité, qui dispose qu’un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette pas de faire face à son obligation, n’est pas applicable aux opérations de crédit dont le montant est supérieur à la somme de 21.500 €. Selon la banque, la Cour d’Appel, en décidant que cet article s’applique sans distinction à tous les cautionnements, pour conclure que Mme X pouvait se prévaloir de cette dispositions quelle qu’ait été la nature et l’ampleur du cautionnement, a violé l’ article L.341-4 du code de la consommation ;
que la charge de la preuve du caractère disproportionné du cautionnement incombe à la caution, dés lors qu’il ne résultait pas des documents communiqués par la caution, au moment où elle a été appelée, un patrimoine différent de celui déclaré lors de la souscription. Il lui appartenait donc selon la banque, d’apporter la preuve du caractère disproportionné de cautionnement souscrit à la date à laquelle elle a été appelée en garantie. La banque considère donc que la Cour d’Appel en faisant peser sur elle la charge de la preuve a méconnu les dispositions de l’article 1315 du Code Civil.
La Cour de Cassation approuve la Cour d’Appel en énonçant :
d’une part, après avoir constaté que l’engagement de caution avait été souscrit le 30 novembre 2004, c’est à bon droit que la cour d’appel a décidé que les dispositions de l’article L.341-4 du code de la consommation, issu de la loi du 1er août 2003 était applicable ;
d’autre part, il résulte de la combinaison des articles 1315 du code civil et L.341-4 du code de la consommation qu’il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d’un cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion aux biens et revenus de la caution, personne physique, d’établir qu’au moment où il l’appelle le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation.
La cour de Cassation de conclure que la cour d’appel, après avoir constaté la disproportion de l’engagement souscrit par Mm X., qu’il ne ressortait pas des éléments communiqués qu’au moment où elle a été appelée en qualité de caution, elle avait un patrimoine différent de celui déclaré lors de la souscription de son engagement, c’est sans inverser la charge de la preuve qu’elle a retenu que la caution n’était pas en mesure de faire face à son obligation.
Il est important de noter que la 1ère chambre civile accorde sa jurisprudence avec celle de la chambre commerciale
Geneviève FERRETTI
Vivaldi-Avocats
[1] cf notre article du 5 juin 2014 : « ATTENTION CREANCIERS : La preuve de la solvabilité de la caution lors de l’appel en paiement vous incombe !!! » sous cass com., 1er avril 2014