Source : Cass. Com 14 octobre 2014, Pourvoi n°13-24.555 FSP+B
L’article L.641-13, 1, du Code de Commerce est l’article relatif aux créances dites « méritantes ».
En effet, le législateur a prévu le mécanisme selon lequel un créancier qui continue à travailler avec le débiteur en procédure collective, prend un risque en travaillant avec cette société en connaissance de cause, risque qui doit avoir pour contrepartie un privilège supérieur dans le cadre des répartitions, pour le cas où la société devait être placée en liquidation judiciaire.
L’article vise plusieurs types de créances :
– Les créances nées pour les besoins du déroulement de la procédure ;
– Pour les besoins de la période d’observation antérieure ;
– En raison d’une prestation fournie au débiteur pour son activité professionnelle postérieure.
La doctrine a qualifié ces créances de « créances postérieures méritantes ».
Dans le cas d’espèce, l’administration fiscale requérait, pour sa créance de taxe foncière, le bénéfice du privilège des créances postérieures méritantes, estimant que celle-ci était née pour les besoins de la procédure.
Plus précisément, la société débitrice avait été placée en liquidation judiciaire en 2008, et ses locaux loués à des tiers de 2008 à 2011, au cours de la liquidation judiciaire.
Le litige, objet de l’arrêt, portait sur la créance de taxe foncière de 2010.
L’administration fiscale soutenait que le paiement de la taxe foncière, due à raison de la détention du bien immobilier au 1er janvier de l’année considérée, faisait partie des obligations que le propriétaire doit acquitter afin de pouvoir conserver le bien objet de la location, dans son patrimoine.
Ainsi, la créance de taxe foncière était nécessairement une créance née pour les besoins de la procédure.
La cour de Cassation rejette le pourvoi de l’Administration Fiscale, considérant à l’inverse que la créance de taxe foncière n’est pas une créance née pour les besoins de la procédure.
Ce faisant, elle fait une lecture, selon nous, stricte du texte, dans la mesure où il faut comprendre que la mise en location des locaux des débiteurs était totalement étrangère à l’activité professionnelle initiale de la société en liquidation.
De même, le paiement de la taxe foncière n’était qu’une conséquence de l’absence de réalisation du patrimoine immobilier et non un pré-requis à la poursuite de la procédure.
L’argumentation de l’administration fiscale était pourtant séduisante, mais, une fois encore, la Cour de Cassation valide en quelque sorte, l’expression usuellement utilisée en doctrine de « créanciers méritants ».
Seuls les créanciers ayant véritablement apporté quelque chose à la société (fournisseurs, banquiers apporteurs d’argent frais, etc …) peuvent bénéficier de ce privilège.
Les caisses sociales, les administrations fiscales, ou encore les créanciers ayant obtenu la condamnation du débiteur, n’apportent en réalité aucune « valeur ajoutée », de sorte que le législateur et à sa suite, la Cour de Cassation, leur refusent le bénéfice du privilège de l’article L.641-10.
La solution devra être approuvée sous réserve.
Etienne CHARBONNEL
Vivaldi-Avocats