SOURCE : Conseil d’Etat 21 février 2018 n°411488 ; 411394 et 411497
La Charte du contribuable établie en 2005 et actualisée en 2007, est un document relatif à la procédure d’imposition et aux relations entre les contribuables et l’administration fiscale, qui est publiée sur le site du Ministère de l’Economie et des Finances et est disponible dans les services des Finances publiques.
La Charte du contribuable de 2005 ne doit pas être confondue avec la Charte des droits et obligations du contribuable vérifié laquelle a pour objet de résumer les principales règles applicables en matière de contrôle fiscal. Conformément aux dispositions de l’article L10 du Livre des Procédures fiscales, cette Charte des droits et obligations du contribuable vérifié est opposable à l’administration fiscale, même si la méconnaissance des règles qui figure dans la charte n’affecte la régularité du contrôle que si elle porte atteinte, de façon substantielle, aux droits et garanties reconnus par la Charte[1].
En l’espèce, le Conseil d’Etat s’est penché sur la valeur de la Charte du contribuable de 2005.
Rappel des faits et de la procédure
Par trois arrêts du 11 avril 2017, la Cour Administrative d’Appel de Marseille a jugé, confirmant la décision des premiers juges, que la Charte du contribuable publiée le 2 septembre 2005 sur le site internet du Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, n’est opposable à l’administration ni sur le fondement de l’article L10 du Livre des Procédures fiscales, lequel ne vise que la Charte des droits et obligations du contribuable vérifiés, ni sur celui de l’article L80A du même Livre, qui ne peut être utilement invoqué à l’appui de la contestation de la régularité de la procédure d’imposition.
La Cour Administrative d’Appel a ajouté que les requérants ne pouvaient utilement invoquer la charte du contribuable de 2005, et notamment les énonciations selon lesquelles le contribuable reçoit une réponse à ses observations dans un délai de 30 jours, et les agents saisis d’un recours doivent statuer dans les plus brefs délais, dès lors que ce document n’est pas opposable à l’administration. Par suite, la Cour écarte le moyen tiré de la méconnaissance du principe de sécurité juridique.
Les requérants demandent au Conseil d’Etat d’annuler ces arrêts et de régler l’affaire au fond.
Au soutien de leur pourvoi, ils estiment que la Cour Administrative d’Appel de Marseille a insuffisamment motivé ses arrêts, qu’elle a dénaturé les faits et commis une erreur de droit en jugeant la Charte du contribuable inopposable à l’administration et en déduisant l’absence de violation du principe de sécurité juridique.
La décision du Conseil d’Etat et sa portée
Conformément à l’article L822-1 du Code de Justice Administrative, lequel énonce :
« le pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat fait l’objet d’une procédure préalable d’admission. L’admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n’est fondé sur aucun moyen sérieux »,
le Conseil d’Etat a pris la décision de refuser l’admission des pourvois formés par les requérants.
En agissant ainsi, le Conseil d’Etat valide la position des juges du fond et confirme que l’administration n’est pas tenue de se conformer aux indications contenues dans la Charte de 2005.
Cette décision complète la jurisprudence de la Haute Juridiction concernant les différents écrits émis par l’administration fiscale.
Le Conseil d’Etat avait déjà refusé la recevabilité du recours pour excès de pouvoir formé contre le précis de fiscalité édité par l’administration fiscale, faute pour celui-ci de contenir une prise de position opposable à l’administration sur le fondement de l’article L80 A du LPF[2].
De même, le Conseil d’Etat a refusé la recevabilité du recours pour excès de pouvoir fondé contre le guide de l’évaluation des biens en jugeant qu’une Cour Administrative d’Appel, après avoir regardé à bon droit le guide de l’évaluation des biens comme ne constituant pas une interprétation formelle de la loi fiscale dont les contribuables peuvent se prévaloir sur le fondement de l’article L80A du LPF, ne commet pas d’erreur de droit[3].
Clara DUBRULLE
Vivaldi-Avocats
[1] Conseil d’Etat, 10 novembre 2000, n°204805
[2] Conseil d’Etat, 1er mars 2004, n° 254081, Syndicat National des Professions du Tourisme
[3] Conseil d’Etat, 16 octobre 2013, n° 339165 et 339166