L’intention de nuire à l’employeur : la délicate frontière entre faute lourde et faute grave.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

 

SOURCE : Cass Soc., 22 octobre 2015, Arrêt n° 1730 FP-P+B (n° 14-11.291).

 

Un salarié avait été engagé le 02 janvier 2006 en qualité d’assistant export pour les pays de l’Est par une société viticole.

 

Ayant appris d’un client qu’il avait procédé au règlement partiel d’une facture par un virement de 60 000 € fait directement sur le compte personnel du salarié, à la demande  expresse de celui-ci, l’employeur engageait à son égard une procédure de licenciement.

 

Le salarié a été licencié pour faute lourde par un courrier recommandé du 11 mars 2009.

 

Contestant son licenciement, le salarié saisissait le Conseil des Prud’hommes de BORDEAUX qui le déboute de l’ensemble de ses demandes, de sorte qu’il va interjeter de la décision.

 

Cette affaire va donc être examinée par la Cour d’Appel de BORDEAUX, laquelle, dans un Arrêt du 26 novembre 2013, va considérer qu’en détournant sur son compte personnel la somme de 60 000 € qui devait revenir à la société en paiement d’une partie d’une facture correspondant à une commande de vin, le salarié a manifestement commis une faute grave avec l’intention de nuire à son employeur, ce qui constitue un abus de confiance commis au préjudice de celui-ci. La Cour d’Appel de BORDEAUX va considérer que le licenciement est bien fondé sur une faute lourde et confirmer le Jugement des Premiers Juges.

 

Ensuite de cette décision, le salarié se pourvoit en Cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, il reproche à l’Arrêt d’Appel d’avoir retenu la faute lourde avérée en se basant uniquement sur la nature de la faute commise par le salarié.

 

Bien lui en prit, puisque la Chambre Sociale, énonçant que la faute lourde est caractérisée par l’intention de nuire à l’employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui apporter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d’un acte préjudiciable à l’entreprise, et considérant que l’Arrêt d’Appel n’a pas caractérisé la volonté de nuire du salarié, la Chambre Sociale censure l’Arrêt d’Appel.

 

Par cet Arrêt, la Cour de Cassation réaffirme que la faute lourde ne saurait se déduire de la gravité extrême de la faute commise. Encore faut-il que la volonté de nuire à l’entreprise ait été expressément recherchée par le salarié et soit clairement établie.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

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