Indemnité transactionnelle partiellement redressée suite à un contrôle d’URSSAF

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Arrêt de la 2ème Chambre Civile de la Cour de Cassation du 21 juin 2018, n° 17-19.773 (F-P+B).

 

Une société avait pris l’initiative de licencier pour faute grave 11 salariés en 2007, 2008 et 2009, salariés qui avaient immédiatement cessé de travailler dès la notification de licenciement.

 

Des transactions ont été conclues soit devant le Conseil des Prud’hommes, soit à l’amiable, l’employeur versant à chaque ancien salarié une somme forfaitaire à titre de dommages et intérêts afin de mettre fin à toute contestation et tout litige.

 

A l’occasion d’un contrôle d’URSSAF portant sur la période 2207 à 2009, l’URSSAF a reconstitué et évalué pour chacun des salariés licenciés pour faute grave, ce qu’aurait été l’indemnité de préavis et a considéré que cette somme devait être soumise à cotisation et CSG et CRDS.

 

La société employeur a contesté ce point du redressement en faisant valoir que dans le cadre de chaque transaction, elle avait expressément déclaré qu’elle ne renonçait pas à se prévaloir de la faute grave de son ancien salarié et que l’ancien salarié avait renoncé, en toute connaissance de cause, à toutes les réclamations en rapport avec l’exécution et la rupture de son contrat de travail, au nombre desquelles se trouvaient donc les indemnités de préavis et de licenciement.

 

L’URSSAF maintenant son chef de redressement, la société l’a contesté par-devant le Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale, lequel, dans une décision du 17 avril 2015, a fait droit à la demande de l’URSSAF.

 

En cause d’appel, cette affaire arrive par-devant la Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE laquelle, dans un Arrêt du 04 avril 2017, examinant minutieusement chaque protocole et chaque procès-verbal de conciliation versés aux débats, considère qu’ils sont rédigés en termes clairs, précis et sans ambiguïté et qu’il en résulte que la rupture du contrat de travail reste un licenciement pour faute grave, étant souligné que le salarié n’avait pas exécuté de préavis et que l’indemnité transactionnelle ne comporte aucun élément de rémunération soumis à cotisation, puisque dans le contexte de la transaction ou du protocole, le salarié renonce expressément à demander le paiement de quelque somme que ce soit (indemnité de préavis ou de licenciement ou autre) dans le cadre d’un recours contentieux.

 

Par suite, la Cour en déduit qu’il n’existe aucun élément de fait permettant de dire que l’URSSAF aurait trouvé des informations lui permettant de dire que du seul fait de la transaction, l’employeur aurait nécessairement renoncé à la qualification de faute grave et qu’une partie des indemnités transactionnelles comprendrait de manière certaine et incontestable des éléments de rémunération soumis à cotisation justifiant un redressement.

 

En conséquence, la Cour considère que l’URSSAF n’était pas fondée à reconstituer fictivement les montants des indemnités inexistantes et de les soustraire de l’indemnité transactionnelle et de dire qu’elles devaient être soumises à cotisations.

 

Par suite, la Cour d’Appel infirme la décision des Premiers Juges et annule le redressement portant sur cette somme au titre des périodes vérifiées.

 

Ensuite de cette décision, l’URSSAF forme un pourvoi en cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, l’URSSAF prétend que le versement d’une indemnité globale forfaitaire transactionnelle à un salarié dont le licenciement a été prononcé pour faute grave implique que l’employeur a renoncé au licenciement pour faute grave initialement notifié dont il ne peut plus se prévaloir des effets, de telle sorte que l’indemnité comprend nécessairement l’indemnité compensatrice de préavis soumise à cotisations.

 

Mais la deuxième Chambre Civile de la Haute Cour ne va pas suivre l’URSSAF dans son argumentation.

 

Enonçant qu’il résulte des dispositions du premier alinéa de l’article L.242-1 du Code de la Sécurité Sociale, que les sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail sont comprises dans l’assiette de cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, à moins que l’employeur à moins que l’employeur ne rapporte la preuve qu’elles concourent, pour toute ou partie de leur montant, à l’indemnisation d’un préjudice, et relevant que l’Arrêt d’appel retient que chaque protocole et chaque procès-verbal de conciliation versé aux débats est rédigé en termes clairs, précis et sans ambigüité que la volonté des parties y est clairement exprimée, que la rupture du contrat de travail reste un licenciement pour faute grave et l’indemnité transactionnelle ne comporte aucune indemnité de licenciement ou de préavis, que le salarié n’a pas exécuté de préavis et s’engage à ne demander aucune indemnité et à n’engager ou poursuivre aucun contentieux.

 

En conséquence, la deuxième Chambre Civile de la Haute Cour considère que la Cour d’Appel appréciant souverainement la valeur des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, en a exactement déduit que la société rapportait la preuve que les indemnités litigieuses compensaient un préjudice pour les salariés, leur montant n’entrant pas dans l’assiette des cotisations sociales.

 

Par suite, elle rejette le pourvoi.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

 

 

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